Le Berliet puis Renault PR100 est un autobus connu de nombreuses villes françaises, exploité par quasiment tous les réseaux de transport urbain. Il marque surtout la renaissance de Berliet sur le domaine des autobus urbains après l’échec cuisant du PCM…
Dans les années 1960, la Saviem prend l’avantage sur Berliet concernant le marché des autobus standards destinés aux réseaux de transports en commun, RATP en tête. Lorsque Saviem dévoile le SC10, Berliet propose un PCM à la caisse en aluminium (mais châssis en tôle) plus cher à l’achat et dont les coûts d’exploitations s’avèrent plus élevés que ceux de son rival. Le bilan est terrible, fin 1969, Saviem a écoulé quasiment 1.500 SC10 quand Berliet ne compte que quelques centaines de PCM vendus, un échec tel que la branche autobus de Berliet semble en sursis.
Plutôt qu’abandonner le marché à la Saviem, Berliet décide d’utiliser cet échec pour concevoir un nouvel autobus standard qui répondrait aux attentes des villes françaises et étrangères. Le bureau d’études et de méthodes de Berliet détermine alors un cahier des charges avec de grandes lignes directrices : concevoir un produit fiable à un prix compétitif, simple à industrialiser, prenant en compte les coûts d’exploitation du véhicule dès l’origine tout en améliorant le poste de travail du conducteur. Face au succès du Saviem SC10, Berliet se lance dans une course contre la montre pour proposer son bus urbain moderne.
Rapidement, les grands traits du futur autobus se dessinent, le nouvel autobus est construit autour d’une structure autoportante, présentant un gain de poids et de rigidité tout en améliorant le volume intérieur. Le moteur, placé à l’arrière, permet de faciliter l’accès aux mécaniciens et éviter les nuisances dans l’habitacle (chaleur, odeurs...), répondant ainsi aux recommandations de l’Union Internationale des Transports Publics, alors que les constructeurs français suivaient alors les normes dictées par l’Union des Transports Publics Urbains et Régionaux.
Sur le PR100, Berliet tente de diminuer le nombre de pièces : l’ensemble des vitrages latéraux sont interchangeables, le pare-brise et la lunette arrière sont également identiques. Pour finir, Berliet équipe la face avant de baies dites « grand angle » permettant, outre d’imposer une image de marque, de casser les angles morts pour le conducteur. Ce dernier est d’ailleurs le seul personnel à bord, abandonnant l’exploitation avec un receveur comme il était d’usage alors.
La conception de ce nouvel autobus, réalisé à l’aide de maquettes grandeur nature, permet de réduire le délai de conception. Ainsi, en 1970, deux prototypes sont déjà opérationnels et permettent déjà d’effectuer des mises au point en interne, puis de tester cet autobus en condition réelle sur le réseau de Nice. En mai 1971, lors de la 20ème semaine internationale du car à Monte-Carlo, Berliet dévoile officiellement son nouvel autobus, le PR100, pour 100 places (70 debout, 29 assises, 1 conducteur).
Pour engranger ses premières commandes, Berliet propose à ses clients une cellule de suivi pour répondre aux réclamations des clients et y apporter des solutions pérennes. Le gestionnaire des réseaux de Montpellier, Besançon et Dijon passe la première commande pour 80 unités. Les 1.163 premiers Berliet PR100 sont équipés de moteurs V8 Perkins (PR100-PA), troqués courant 1973 pour le moteur Berliet V800. A l’usage, ces deux moteurs s’avèrent bruyant, peu fiables, gourmands tant en huile qu’en gasoil.
Ces premières remontés de terrain débouchent sur la présentation du PR100-MI en 1977, équipé d’un six cylindres en ligne Berliet (MIP 06 20 30), nécessitant de revoir la structure arrière de l’autobus et d’incliner le moteur de 55° pour ne pas empiéter dans l’habitacle. Malgré quelques défauts de jeunesse rapidement gommés, le PR100-MI fut la version qui connait le plus gros succès.
En parallèle, les municipalités de Lyon, Grenoble et Saint-Etienne, encore équipées en trolleybus, s’unissent pour demander aux constructeurs français de leur proposer un produit pour remplacer leur flotte, essentiellement composée de Vetra, un constructeur depuis disparu. Seul Berliet tente l’aventure en électrifiant son PR100 avec Alsthom qui devient ER100, permettant de s’attribuer un monopole et s’assurer quelques centaines de commandes.
En 1980, le Berliet PR100 devient Renault PR100, un changement de marque qui fait suite à la fusion entre les deux acteurs français du poids-lourd, Saviem et Berliet, pour former Renault Véhicules Industriels. 2.643 Berliet PR100/ER100 avaient été alors produits, c’est donc logement que cet autocar est reconduit dans la gamme RVI, au détriment des Saviem E7 et E110. Cette même année, RVI dévoile une version articulée du PR100, le PR180 et ses 18 mètres de longueur, permettant de répondre à la demande des plus gros réseaux de transport urbain.
En 1984, le PR100 est légèrement revu par Renault qui redessine sa face avant : adoption de pare-chocs proéminents en plastique noir intégrant les optiques et clignotants, tandis que la casquette surmontant la girouette est totalement redessinée. On parle alors de PR100.2, qui outre ces modifications esthétiques, amène un intérieur modernisé, et des vitrages de porte sur toute leur hauteur. Notons également une évolution mécanique avec l’adoption du MIPS 06 20 45 offrant plus de puissance à bas régime.
Au cours des années 1980, sur une proposition d’Heuliez, le PR100 se transforme en Megabus, une version bi-articulée destinée aux grandes villes à la recherche d’un moyen de transport de grande capacité, sans avoir à investir de lourdes sommes pour aménager soit des lignes de tramway ou de métro. Malgré divers essais, seule la ville de Bordeaux se porte acquéreur de cette version.
Si le PR100 est toujours commercialisé au début des années 1990, il ne fait plus autant recette, accusant le poids des années et faisant face à une nouvelle concurrence, notamment du Renault R312 en interne. Néanmoins, le PR100 continue à tracer son chemin et reçoit, en 1993, une nouvelle face avant grâce au carrossier SAFRA qui réussit à adapter le pare-brise du R312, on parle désormais de Renault PR112, dont la carrière s’étala jusqu’en 1999.
La production du PR100 est maintenue deux ans aux côtés du PR112 et s’interrompt en 1995 pour laisser place à l’Agora. De son lancement en 1971 à 1995, c’est plus de 20.000 unités du PR100, toutes versions confondues, qui ont été vendues, en faisant un véhicule commun dans les villes françaises, mais également d’Europe, voire du monde. Car le PR100 réussit l’exploit à s’imposer en Pologne (assemblé par JELCZ), en Algérie (revu par Sonacome) et même en Australie avec l’aide du carrossier Austral Denning. En revanche, le PR100 connait l’échec en Amérique du Nord malgré une tentative au Canada et aux Etats-Unis.