L’industrie automobile espagnole est assez pauvre, puisque à part Seat, il n’y a pas grand monde, si ce n’est Pegaso, Santana, ou encore FASA … Quant à Seat, encore faut-il rappeler que jusqu’en 1981, cette marque ne produisait que des Fiat sous licence, on est donc loin d’un vrai constructeur indépendant, bien que Seat ait sorti quelques modèles spécifiques, comme la Seat 800, qui est une Fiat 600 à quatre portes; ou encore la Seat 1430 Sport… Mais en 1981, l’accord Seat-Fiat cesse sans être renouvelé, et c’est à la hâte que Seat va devoir replâtrer les modèles issus des Fiat pour continuer à exister sans pouvoir être accusé de contrefaçon … Tel fut le cas de la Seat 127, qui devient alors Seat Fura !
Jumelle hispanique de la Fiat 127, la Seat Fura fut produite entre 1981 et 1986 à 84.973 exemplaires, elle représente la période de transition entre l’ère Fiat et la période des premières « vraies » Seat, avec l’Ibiza, débarrassée de tout lien avec la firme italienne. De cette époque d’attente de l’Ibiza, la Fura ne fut pas la seule à être revisitée, on notera que la Seat Panda devient Marbella; la Seat Ritmo s’appelle désormais Seat Ronda. Cette dernière fut même la cause d’un procès entre les deux firmes, Fiat accusant Seat de « contrefaçon » , sans obtenir gain de cause ! Seat gagne, car au vu des accords de rupture avec Fiat, la marque espagnole devait modifier au minimum 25% de chaque modèle pour éviter de s’attirer les foudres de la firme de Turin. Alors pour cet article, zoom sur la Fura
Pour bien comprendre le pourquoi du comment de la Seat Fura, il faut se replonger un peu dans l’histoire de Seat, ainsi que du modèle 127 ! La marque Seat nait au tout début des années 1950 par la volonté du gouvernement de Franco, désireux de doter l’Espagne d’une force industrielle dans le secteur automobile. Mais au lieu de partir d’une feuille blanche, le choix est fait de s’allier avec un autre constructeur, lequel devant fournir à la nouvelle société l’outillage, le savoir faire et des licences afin de produire des véhicules. Et c’est Fiat qui remporta le « marché », et ce pour des raisons simples : Fiat produisait des petites voitures, dont la Fiat 600, qui semblait la plus adaptée à mettre l’Espagne sur roues ! Petit à petit, Seat rencontrant un important succès en Espagne, se trouve en capacité de renouveler sa gamme au fil des nouveautés chez Fiat, mais aussi de proposer des véhicules plus élevé en gamme. Ainsi, fut produit la Seat 850, elle-même remplacée par la Seat 127 en même temps que ce changement était opéré chez Fiat.
C’est donc en Avril 1971 que la Seat 127 est lancée, lors d’une présentation à la presse se déroulant sur l’ile de Lanzarote, au cours du salon de Barcelone, soit quelques jours à peine après que la Fiat 127 ne soit dévoilée ! Pour Seat, tout comme Fiat, la 127 marque un bond en avant, avec l’adoption de nouvelles technologies : traction avant, moteur transversal, suspensions à quatre roues indépendantes … Côté moteur, la Seat 127 reprend l’ensemble moteur-boite conçu pour l’Autobianchi A112 et la Fiat 128, soit un quatre cylindres en ligne de 903cm3 développant 40Cv. La production ne démarra qu’en Avril 1972, et tout de suite, la voiture attire les joies des espagnols. En effet, cette voiture de milieu de gamme était disponible pour de nombreuses familles du fait de l’augmentation du pouvoir d’achat; mais surtout, elle répondait au souhait de ces dernières de disposer d’une voiture qui soit à la fois polyvalente et spacieuse. Et force est de constater que la Seat 127 répondait aux attentes des espagnols, puisque ce n’est pas moins de 1.345.203 exemplaires qui seront produit jusqu’en 1981, dont les derniers exemplaires furent écoulés en 1982 ! Puis à partir de 1981, la Seat 127 cède sa place à la Seat Fura pour les raisons évoquées plus haut…
Extérieurement, la Seat Fura ressemble à deux gouttes d’eau à une Fiat/Seat 127. Cependant, en y regardant de plus près, un grand nombre d’éléments sont spécifiques, comme le capot qui adopte un léger bossage; les optiques avants et arrières, tout comme les clignotants dont les dimensions sont spécifiques à la petite Seat; les répétiteurs de clignotant sur les ailes; la calandre qui bien sur est propre à la Fura; les vitres avants sans déflecteurs … Plus on y regarde, plus on pourrait jouer aux jeux des erreurs entre la Seat Fura et la Fiat 127 … D’ailleurs, les ingénieurs de chez Seat sont allé loin, en décalant le moteur de 5mm vers la droite comparé à la Fiat 127, ce qui fait que les cardans sont spécifiques à la Fura !
Avec la Fura, tout comme les autres modèles revisités (Marbella, Ronda), Seat s’ouvrait les portes de l’Europe, mais le problème pour la marque hispanique, c’était que Fiat y été déjà implanté ! Dans ces conditions, difficile de se faire une place, d’autant plus que Fiat disposait déjà d’une certaine image, bien que la marque italienne sortait d’une crise dont elle commençait tout juste à se relever. Quant à Seat, la conquête de l’Europe était vitale pour elle, car depuis l’ouverture du marché automobile espagnol aux marques étrangères, Seat perdait inexorablement des parts de marchés.
Pour se démarquer de la concurrence, et notamment le fait que la Fura était une voiture ancienne (Fiat commençait à remplacer sa 127 par l’Uno), Seat mise sur l’équipement et la finition, le tout étant très bon marché. Ainsi, la Fura se décline en plusieurs versions (L, CL, GL), sans oublier une anecdotique versions sportive nommée « Chrono »; mais c’est bien la version GL qui remportait le plus de succès, et pour cause, celle-ci se classait dans les voitures les mieux équipées de sa catégorie, avec, entre autre, un compte-tour, des vitres teintées, une montre digitale et j’en passe; le tout pour un prix défiant une grande partie de la concurrence. Dans ses autres versions (L et CL), la Fura paraissait plus dépouillée, mais le minimum nécessaire à la conduite tout en ayant un minimum d’agrément était présent.
Ainsi, en dépit de ses lignes venant d’une autre époque, la Fura était une voiture relativement silencieuse et transportait ses passagers dans un confort relativement bon pour les années 1980, notamment pour une citadine ! En revanche, le moteur âgé lui aussi d’une bonne décennie, du haut de ses modestes 40Cv, a du mal a lutter côté performances avec les rivales du segment, et ceux que la boite soit longue (4Cv) ou courte (5Cv). La Fura se traîne un peu en dehors de la ville, consomme aussi, il ne faut pas espérer descendre sous les 7 litres au cent ! Côté performances, la vitesse maximale est donnée pour 130km/h, le 0-100km/ en 19,6 secondes … on l’a compris, la Fura n’est pas sportive pour un sou !
Ceci dit, à la conduite, la Fura semble préférable en boite courte, puisque ses 5 vitesses permettent un usage optimal en milieu urbain, la voiture est nerveuse, elle permet de bonnes accélérations jusqu’à 50km/h en utilisant les quatre premières vitesses. La cinquième quant à elle se passe une fois sortie de la ville, ce dernier rapport sera parfait pour rouler tranquillement entre 80 et 95Km/h. En revanche, il faudra quelque peu lancer la voiture pour arriver à cette vitesse de croisière, et espérer ne pas avoir à grimper trop de côtes …
La Seat Fura présentée sur cet article est un modèle GL datant de 1984, cette voiture fut achetée neuve à la concession Sonauto de Limoges, qui était alors l’importateur officiel de la marque Seat en France (il importait aussi les Porsche !). Livrée fin Novembre 1984, sa propriétaire en prend possession et roulera avec pendant dix-neuf années, années durand lesquelles cette Fura roule seulement entre le petit village où elle réside, jusqu’à Limoges, lieu de son travail, ce qui représente à peine 40km journaliers ! Une à deux fois par an, cette personne partait, comme tout bon limougeaud qui se respecte, vers la mer direction Royan ! Au cours de cette première vie, cette Fura connait un petit accrochage, qui lui vaudra un changement des optiques avant gauche ainsi que de la calandre, et une peinture neuve sur l’aile et le capot ainsi affectés Elle gardera de cet évènement deux cicatrices : une légère pliure de l‘aile avant gauche et du pare-chocs. Puis en 2003, las de la consommation élevée, mais aussi de la vieillesse de cette voiture, dont les pièces ne se trouvent plus dans le réseau Seat, sa propriétaire décide de changer de voiture, et remise cette Fura au fond de sa cour, sous un appentis où elle fut à moitié abritée. Elle y restera durant cinq ans durant, avant qu’elle ne soit donnée à un garagiste spécialisé dans l’automobile ancienne.
Ce dernier, ne sachant que faire de cette Fura, qui n’est pas encore une voiture de collection, et donc qui se vend difficilement, mais aussi par manque de temps, décide de la remiser à son tour. Après une année de stockage, ce garagiste devant faire des travaux, décide de faire du tri dans ses voitures, et fit partir à la ferraille celles qui n’avaient pas d’avenir puisque trop abimées, puis donna à des passionnés de voiture anciennes celles pouvant être restaurées, ce qui fut le cas de cette Fura.
Récupérée en Octobre 2009, le moteur fut redémarré dans la foulée, puis l’hiver arrivant, elle fut encore une fois remisée. C’est une fois les beaux jours revenus au printemps 2010 que la mise en route se met en marche, freinage, allumage, échappement, beaucoup de pièces sont changée, jusqu’à la boite de vitesses qui donnait quelques signes de faiblesses. Durant l’été 2010, cette voiture refit ses premiers tours de roues au volant de son second propriétaire … Et depuis cette remise en route, cette Seat Fura se porte à merveille, enchainant les kilomètres les uns après les autres !
Les +
_ alternative peu connue à la Fiat 127
_ confort et équipement
_ qualité du métal meilleur que sur la Fiat
_ moteur éprouvé et disponibilité des pièces mécaniques
Les –
_ disponibilité et nombre des pièces spécifiques
_ moteur un peu « mou » une fois sortie d’agglomération et en côte.
_ consommation
_ image
L’avis d’Alex
Qu’il est difficile de donner un avis objectif sur sa propre auto ! Néanmoins, je tente l’exercice… La Seat Fura fait partie de ces autos oubliées qui méritent d’être redécouvertes. Mais pour la Fura, cet exercice est rendu compliqué par plusieurs éléments : la voiture est « cachée » par sa jumelle Fiat 127 bien plus connue; la Fura n’a laissée que peu de traces dans le marché automobile français, faute à un faible nombre de ventes, dû à une campagne publicitaire minimaliste. De plus, l’aspect de cette auto n’est pas des meilleurs, l’importante part donnée aux plastiques se fait ressentir, encore plus lorsque la voiture arbore une couleur autre que le noir. Néanmoins, la Seat Fura peut faire une bonne youngtimmer pour rouler au quotidien, fiabilité aidant, d’autant plus que les prix d’achats sont dérisoires (comptez entre 500 et 850€ pour un modèle en état correct), et que cette voiture n‘étant pas un « placement d‘avenir », ne causera aucun soucis si elle s‘abime. Reste le plus dur à faire, en dénicher une …