Le 18 mars 1976 est une date qui entre dans l’histoire des faits divers et notamment pour l’assureur MAIF. Ce jour-ci, l’un de ses assurés coinçait sa voiture sur une voie ferrée très fréquentée, provoquant une inévitable collision avec un train. Si cet accident n’a heureusement pas fait de victime, il est l’un des accidents « routier » français ayant coûté le plus cher à un assureur !
Le 17 mars 1976 est une soirée de match de foot, Saint Etienne affronte l’équipe de Kiev en quart de finale de la C1 et réussi l’improbable exploit de se qualifier pour la demie-finale. De nombreux supporters de l’ASSE regardaient le match à la télévision et s’étaient réunis entre amis pour regarder cette confrontation, tantôt au bar, tantôt chez certains d’entre eux. Et bien évidement, on ne compte pas les litres de vin et autres bières consommées ce soir là. C’est le cas de l’acteur de notre article, un jeune homme de 26 ans, ayant regardé ce match entre amis et ayant ouvert quelques bouteilles de vin.
Vers deux heures du matin, notre homme reprend le volant avec un ami à bord de sa voiture, une Citroën Traction (lire aussi : Citroën Traction) dans un piteux état et chaussée de divers pneumatiques, dont un pneu clou. Une demie-heure plus tard, dans la commune de Bar-le-Duc, notre équipe aborde un virage trop rapidement. Et hélas, ce virage était suivi d’un passage à niveau, la voiture rate son virage et s’échoue de nombreux mètres plus loin, sur la voie ferrée qui relie Paris à Strasbourg, une voie très fréquentée de nuit pour le fret avec plusieurs trains par heure.
La Citroën Traction est coincée sur les rails, elle ne peut ni reculer, ni avancer. Le conducteur de la voiture rejoint le passage à niveau pour donner l’alerte sur le téléphone de secours, à peine a t’il le temps d’arriver et d’appeler l’agent de garde que les phares d’un train percent la nuit à la vitesse de 130km/h, la surprise fut telle qu’il lâcha le téléphone, il s’exprima sur ce moment deux mois plus tard dans Paris Match :
« J’ai vu les phares du train trouer la nuit et j’ai lâché l’appareil. J’ai dit à mon copain : Y’a deux voies, donc y’a une chance sur deux. Puis, ça été devant mes yeux l’apocalypse. J’ai vu ma voiture monter à 30 mètres de haut, projetée 50 mètres plus loin. La locomotive est sortie des rails, a continué à rouler presque droit puis a percuté le pont qui s’est effondré. Les wagons sont tombés avant la loco dans le canal de la Marne au Rhin, les uns après les autres. Un, deux, trois, puis la motrice, puis d’autres wagons encore. J’ai été à l’avant du train, j’ai vu le spectacle, j’ai pensé : c’est pas possible, y’a personne de vivant »
Le train venait de percuter la voiture, une partie des wagons sont tombées dans le canal tout proche, endommageant au passage un ouvrage d’art.

Les secours arrivèrent rapidement sur place et ne déplorent aucun mort, les mécaniciens de la locomotive sont légèrement blessés, quant aux deux occupants de la Traction, étant en dehors de la voiture, ils étaient seulement spectateurs de l’accident. Le conducteur alla même se présenter aux gendarmes en expliquant que c’était de sa faute. Les forces de l’ordre sentent l’alcool quand le conducteur de la Traction parle et l’amènent au poste pour relever son taux d’alcoolémie. Celui s’avère positif, puis quelques tests complémentaires à l’hôpital donnent un résultat de 0,60 grammes… le taux légal d’alors, notre conducteur du jour peut jouer à la loterie nationale !
Mais même si le conducteur de la Traction n’était pas en infraction, les ennuis vont commencer pour lui, on lui reproche plusieurs fautes : d’avoir rouler avec un pneu lisse, un défaut de maîtrise de son véhicule, de blessures involontaires et d’entrave à la circulation ferroviaire. Commence le processus classique dans les affaires judiciaires : prises des empruntes, photos, et 36 heures de gardes à vue. Au bout de celle-ci, le permis de conduire lui est retiré, sa carte d’identité conservée avec interdiction de quitter le département et une caution de 5.000 Francs doit être versée, dont 3.200 à verser en mensualités de 500 francs.
Mais une question se pose, qui va payer les dommages causés par l’accident estimés à plus de trois milliards de francs ? La réponse sera donnée par M. Marcus, directeur de la MAIF : c’est l’assurance qui prendra en charge l’accident puisque la voiture était assurée chez eux, en déclarant que : « Le principe de l’assurance, c’est de couvrir les fautes de l’assuré. Certes pour nous cette affaire, c’est un coup dur qui ne passe pas inaperçu, mais nous ne sommes pas les seuls à prendre le sinistre en charge. Au-delà d’une certaine somme, nous sommes nous-mêmes réassurés ». M. Marcus refuse de dramatiser l’affaire, déclarant qu’avec ses 903.000 adhérant, la MAIF recevait chaque année 860 millions de francs, et le dommage serait réparée avec une augmentation de 300 Francs par adhérant.
Bien que la responsabilité de la SNCF fut engagée puisque sept autres accident avaient eu lieu sur ce passage à niveau, les parties font les comptes des dommages : Pour la SNCF : 4 millions de francs pour la locomotive, 21 wagon à 150.000 francs l’unité, plus les marchandises transportées par le train, des canettes de bière Kronenbourg et des paquets de potage Knorr. S’ajoutent les frais annexes : dégagement du train, repêchage des wagons tombés dans le canal, réfection de la voie ferrée, du pont endommagé, l’arrêt de la navigation fluviale sur le canal, détournement de la ligne de chemin de fer, qui était l‘un des axes majeurs de la SNCF. Même l’association de pêche à la ligne du canal se porte partie civile pour obtenir dommages et intérêts à hauteur de 2.000 francs pour la mort de 100kg de poissons du fait des denrées alimentaires tombées dans l’eau…En cumulant l’ensemble des dommages, on arrive à la somme de 3 milliards de Francs.