Fin 1919, une petite voiturette apparaît sur le marché allemand, avec une carrosserie en bois et un moteur électrique, elle alors considérée comme la plus petite automobile du marché : la Slaby-Beringer.
A la fin de la Première Guerre Mondiale, l’allemand Rudolf Slaby, alors ingénieur aéronautique (il était précédemment au pôle recherche et développement chez Daimler) et fils du co-fondateur de Telefunken, se voit contraint de changer de voie en raison de Traité de Versailles. L’Allemagne, vaincue, doit livrer son aviation aux vainqueurs, l’armée allemande étant interdite de reconstituer une aviation militaire, l’aviation civile étant quant à elle limitée dans ses capacités, si bien que BMW se reconvertit dans les deux-roues, Fokker partant aux Pays-Bas. Rudolf Slaby retourne vers l’automobile et intègre le service Recherches et Brevets du constructeur NAG et, sur ses heures personnelles, se met à imaginer un petit véhicule automobile pour mouvoir une personne.
La voiture conçue par Slaby est une voiturette monoplace construite autour d’une caisse autoportante en contreplaqué, une technique alors utilisée dans l’aviation; et un moteur électrique pour la mouvoir, Rudolf Slaby ayant pu connaître les moteurs électriques lors de son premier emploi chez Bergmann Elektrizitäts AG. Slaby réalise ses premiers essais lors du printemps 1919, il rencontre alors Jörgen Skafte Rasmussen, le fondateur de DKW, qui tentait alors de mettre au point une voiture à vapeur. Sans succès, il se tournera dès le début des années 1920 vers la moto avec le succès qu’on lui connait. L’heure n’est pas encore aux deux-roues lorsque Slaby présente sa voiturette à Rasmussen, ce dernier est convaincu par sa simplicité et en commande cent exemplaires.
Avec cette commande à honorer, Rudolf Slaby doit mettre en place un atelier pour produire sa voiturette. A cette fin, il s’associe avec Hermann Beringer, son cousin, également ingénieur, qui lui permet de s’installer dans une partie des ateliers de la société de son père située à Berlin. Slaby et Beringer construisent les cadres en bois et la carrosserie, le moteur électrique devant être fourni par la société Levy. Cette dernière connait hélas de nombreux retard dans la production des moteurs, mettant déjà en difficulté la naissance de cette société.
le 15 octobre 1919, tout est fin prêt, la société « SB-Automobil-Gessellschaft mbH » est alors constituée, elle porte le nom commercial « Slaby-Beringer« . Rasmussen en est associé pour un tiers, Slaby et Beringer se partageant le reste du capital, Slaby occupe le poste de directeur technique, Beringer s’occupe de la direction commerciale. La production est véritablement lancée courant novembre 1919, le succès est là avec 257 exemplaires produits – et commercialisés – sur le premier exercice de l’entreprise. Slaby-Beringer prend même à son compte l’assemblage des moteurs électriques pour palier aux défaillances de la société Levy.
La Slaby-Beringer est alors présentée comme la plus petite voiture d’Allemagne, pesant à peine 200kg, son moteur électrique est alimenté par des batteries plomb-acide de 24V et développe 0,25Ch, ce qui permet une vitesse maximale à 25km/h. Pour la direction, le conducteur dispose non pas d’un volant mais d’un « guidon ».
A la fin 1920, Slaby-Beringer prend en location un second atelier pour stocker les voitures terminées, et reçoit une commande venue du Japon pour 200 voitures à la condition de livrer les voitures avec une batterie de 36V permettant une plus grande autonomie, les voitures devant servir en « libre-service ». Du 23 septembre au 02 octobre 1921, Slaby-Beringer participe au Salon de l’Automobile de Berlin, l’occasion de présenter de nouvelles variantes « biplace » ou « commerciale ». Toujours fin 1921, Slaby-Beringer reçoit une nouvelle commande du Japon, cette fois pour 500 unités.
Malgré une avalanche de commandes, Slaby-Beriger est en difficulté, l’inflation monétaire alors connue en Allemagne fait inexorablement augmenter les coûts de fabrication de la voiture, le prix de vente étant quant à lui bloqué contractuellement, si bien que Slaby-Beriger commence à perdre de l’argent en vendant ses produits… Début 1922, Rasmussen doit ainsi garantir un prêt pour le compte de Slaby-Beringer, il monte alors à 50% du capital de l’entreprise. Ce prêt permet de retrouver des liquidités et de reprendre la production de la voiture.
Rasmussen demande alors à Slaby-Beringer de porter davantage d’attention à son marché intérieur, entre 1921 et 1922, si 535 voiturettes ont été livrées à l’export, seules 36 l’ont été à des clients allemands. A cette fin, il est mis au point un modèle équipé d’un monocylindre de 170cm3 provenant de chez DKW, avec une puissance de 2,5Ch qu’il sera possible de commander en lieu et place du moteur électrique; le dessin général de la voiture est également revu : la carrosserie est plus basse, plus longue, lui donnant presque un air sportif. La présentation de cette nouvelle variante de la Slaby-Beriger a lieu lords du salon de Berlin 1923.
Malheureusement, quelques jours avant ce salon, le 1er septembre 1923, le Japon subit un important tremblement de terre, Tokyo est détruite, la totalité des autres villes affectées. Les portes du Japon se ferme alors pour Slaby-Beringer, le constructeur tente de se relancer sur son marché national et signe des partenariats avec des distributeurs. Sans succès. Endettée, son principal marché détruit, et avec seulement 54 voitures livrées à l’été 1924, Rasmussen décide de mettre un terme à l’aventure Slaby-Beringer le 1er octobre 1924. Les restes de l’entreprise sont absorbées par DKW, Rudolf Slaby est mis à la tête du pôle automobile et doit concevoir la première voiture de DKW, la P15, qui fut commercialisée en 1928…