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Renault Floride et Caravelle

           Octobre 1958, Renault lance la Floride, un agréable cabriolet qui démontre la volonté de la Régie d’entrer sur le marché des voitures de loisirs jusque là mené par Volkswagen. Dérivé de la Dauphine, la Floride en reprend le moteur et son architecture avec le moteur à l’arrière. A noter aussi que la voiture fut commercialisée sous deux noms, puisque la Floride s’appelle aussi Caravelle, un double nom qu’elle portera jusqu’à la fin de sa commercialisation en 1968.

Renault caravelle (1)

                La Renault Dauphine apparait en 1956, petite berline populaire, le succès est immédiat. Le président de la Régie, Pierre Dreyfus pense tenir la voiture qui va permettre à Renault de s’imposer en Europe, voir dans le monde puisque la voiture est présentée aux Etats-Unis en 1957. L’objectif de Renault était alors de contrer Volkswagen, mais pour cela, Renault doit encore investir un créneau, celui des coupés et cabriolets. En effet, Volkswagen y était présent depuis 1955 avec le Karmann Ghia, une voiture dessinée par le carrossier italien Ghia et qui connait un certain succès en Europe comme aux Etats-Unis.

            Ainsi, Renault n’hésite pas à développer une voiture capable d’affronter la Volkswagen, d’autant plus que la réalisation de cette voiture ne poserait pas de problèmes financiers en reprenant les éléments mécaniques de la Dauphine. Pour la carrosserie, Renault s’adresse à Ghia, et c’est Pietro Frua, styliste employé suite à la fermeture de son entreprise qui signe le dessin de la voiture, lequel plait immédiatement aux dirigeants de Renault, si bien qu’il est décidé d’en réaliser trois prototypes en vu de la présentation lors du salon de Paris 1958.

                   Pour ne pas froisser ses principaux rivaux Volkswagen et Fiat, le développement du coupé Renault est confié à Ghia-Aigle, filiale Suisse du carrossier italien. Mais si Ghia-Italie et la Régie Renault s’étaient mis d’accord pour présenter le modèle pour le salon de Paris d’octobre 1958, Ghia-Aigle va présenter l’un des prototypes au salon de Genève 1958 se tenant en Mars. Sous la colère de Pierre Dreyfus, le modèle est rapidement bâché après l’ouverture du salon, lequel fut finalement exposé après de nombreuses tractations.

             Malgré cette présentation anticipée, le projet est mené à son terme et la voiture définitive fait bel et bien son apparition au salon de Paris 1958, sous le nom Floride. A l’origine, cette voiture aurait du s’appeler « Dauphine GT » mais le service commercial de la Régie lui préféra le nom « Floride » afin de montrer les visées de cette voiture à l’exportation. Le dossier de presse remis aux journalistes indiquait qu’elle serait produite sous trois variantes : coupé, cabriolet et cabriolet-transformable avec un Hard-top. Mais ce dossier de presse ne mentionne jamais « Ghia » comme ayant réalisé la carrosserie, au mieux, il est mentionné que « la carrosserie a été réalisée et étudiée en collaboration par les spécialistes de la Régie Renault et un groupe italien ». Simple acte diplomatique pour ne pas froisser ses principaux concurrents ou vengeance de la Régie suite à l’événement de Genève 1958 ?

               La voiture reçoit un accueil prometteur, l’ensemble de la presse salue l’arrivée d’une voiture de loisirs dans la gamme des grands constructeurs. Et surtout, proposée au prix de 850.000 Francs, la Renault Floride se place plutôt bien sur le marché, par exemple, une Simca Océane était vendue 1.310.000 Francs. Renault enregistre plus de 8.000 intentions de commandes entre le salon d’Octobre 1958 et le début de l’année 1959. Par conséquent, tout est mis en œuvre pour livrer les premières Floride pour l’été 1959, mais Renault ne peut accueillir sa production au sein de ses usines : l’Ile Seguin est dévouée à la 4CV, quant à l’usine de Flins, elle est submergée par la Dauphine. Par conséquent, Renault établi un partenariat avec Chausson qui s’occupe de l’emboutissage des pièces de carrosserie, puis Brisonneau & Lotz qui a la charge de l’assemblage final. La commercialisation est lancée en Juin, 3.777 Floride trouvent preneur pour la première année de commercialisation.

                   La voiture est également présentée aux Etats-Unis en Janvier 1959 dans le cadre de la foire de New York, mais sous la dénomination « Caravelle » en référence au fleuron de l’industrie aéronautique française, mais les livraisons n’y débuteront qu’à l’automne 1959. En 1960, Renault écoule 36.156 Floride/Caravelle ! Après les échecs de la Frégate et de la Colorade, et des résultats en demi-teinte aux Etats-Unis, le succès de la Floride arrive au bon moment. Pour les millésimes 1960 et 1961, la voiture ne connait que peu d’évolutions, si ce n’est celles que subie la Dauphine; elles reçoivent ainsi la suspension Aérostable en 1960 puis un répartiteur de freinage en 1961. Mais déjà, le marché sur lequel s’installe la Floride n’est pas aussi solide qu’attendu, et les ventes s’effondrent. En 1961, seulement 12.856 exemplaires sont commercialisés, une chute due notamment à la déroute aux Etats-Unis où Renault ne vend plus que 42.000 voitures (contre 186.000 pour 1959).

            Cette chute des ventes est aussi connue en Europe, causée par des performances limitées et une concurrence féroce qui se met en place. En effet, la Renault Floride est équipée du moteur de la Dauphine, un quatre cylindres en ligne de 845cm3 issu de la version Gordini, qui est poussé à 40Ch grâce à un arbre à came modifié et une admission retravaillée, avec lequel elle peut espérer atteindre un modique 125km/h. En réalité, la Floride a connu les revers d’une mode, la voiture a su dès sa présentation capter une clientèle féminine et citadine. Or, comme tout objet à la mode, le vieillissement prématuré a touché cette voiture.

              Pour relancer le modèle en France, Renault présente la Floride S et la Caravelle, toutes deux animées par un nouveaux moteur issu de la Renault 8, le quatre cylindres en ligne de 956cm3 qui développe 51Cv . Avec ce dernier, la voiture peut désormais atteindre les 135km/h ! Côté dénomination, le cabriolet s’appelle Floride, le coupé Caravelle. Dans les nouveautés, la voiture s’équipe désormais de quatre freins à disques, l’électricité passe au 12Volts, et la boite de vitesses dispose désormais de quatre rapports.

                En 1963, pour éviter de disperser les efforts du service marketing, la dénomination « Floride » disparait pour ne laisser que la Caravelle. La Régie améliore la voiture avec l’adoption du moteur de la R8 Major, le 1.108cm3 de 55Ch et d’une boite avec la première synchronisée. C’est l’ère de la « Caravelle 1100 », laquelle dispose d’une capote et d’une lunette agrandie. En 1964, la gamme est simplifiée pour ne laisser que la Caravelle Convertible avec, aux choix du client, un hard-top ou une capote. Si les évolutions vont dans le bon sens, elles ne s’avèrent guère satisfaisantes pour la clientèle, c’est pourquoi l’ultime version de la Caravelle apparait en Juillet 1965, la « Caravelle 1100S », toujours équipée du même moteur mais dont la puissance est portée à 58Cv. Cette version se démarque par plusieurs petits détails, comme un losange Renault » qui s’installe sur la proue de la voiture, ou encore les feux de position avant qui deviennent rectangulaires…

                La Renault Caravelle termine sa carrière sur cette version en Juillet 1968, après 117.039 exemplaires commercialisés. Le succès fut donc au rendez-vous pour cette voiture de loisirs qui devait incarner « la voiture jeune de tous les âges » à l’époque ou le marché de la seconde voiture naissait. De plus, avec ses couleurs vives et ses nombreux détails dans l’ère du temps, la voiture saura plaire à une large clientèle, mais les amateurs de sensations restaient sur le faim. Cela n’empêche pas la Floride/Caravelle de connaitre son heure de gloire en s’affichant avec les stars du moment, Brigitte Bardot ou encore Grace de Monaco qui auront leur Caravelle… Aujourd’hui, les lignes de la voiture séduisent encore, comme en témoigne la cote soutenue de la voiture.