Nous sommes en 1961, les deux associés de la marque DB sont en froid, chacun ayant sa vision de la voiture sportive. Bref, DB a vécu, René Bonnet part de son côté pour réaliser des sportives à moteur Renault montés en position centrale qui porteront son nom, et concourra en compétition contre son ancien associé, Charles Deutsch. Ainsi va naître la série des René Bonnet Aérodjet…
Fondé en 1947, le constructeur français DB est l’oeuvre de Charles Deutsch et René Bonnet qui, ensemble, réaliseront des voitures sportives à moteur Citroën puis Panhard. Ces derniers vont remporter des dizaines de victoires et inscrire leur marque au panthéon du sport automobile français. Hélas, à la fin des années 1950, Deutsch et Bonnet commencent à avoir des dissensions, quand le premier souhaite rester fidèle aux moteurs Panhard et à la traction, Bonnet souhaite développer une architecture à moteur central. Cette divergence entraine la disparition de DB en 1961, René Bonnet créé sa propre marque, trouve Renault comme partenaire motoriste et le pétrolier BP comme soutient financier, et élabore un programme qui comprend compétition et développement d’une gamme commerciale, le tout dans une usine situé à Romorantin fourni par l’un de ses associés : Matra.
Dans son programme sportif, René Bonnet décide d’aller aux 24 heures du Mans, le dessinateur maison Jacques Hubert réalise une petite GT nommée Djet qui participe à l’édition 1962 de l’épreuve mancelle avec comme seul objectif de remporter l’indice de la performance énergétique. Quatre René Bonnet Djet, deux coach et deux barquettes se lancent avec cet objectif, hélas, l’aventure tourne au fiasco. L’une des barquettes est détruite pendant les essais, la seconde termine à la 18ème et dernière position position, quand aux coach, l’un abandonne en début de course sur une surchauffe moteur, l’autre termine 17ème et avant dernier. Quant à l’indice de performance, il est remporté par Charles Deutsch, son ancien associé de chez DB… Seul lot de consolation, la ligne du coach Djet a plu aux passionnés qui demandent la réalisation d’une voiture de série qui apparaîtra l’année suivante.
Pour l’édition 1964 des 24 heures du Mans, René Bonnet souhaite laver l’affront et affûte ses armes. Côté mécanique, René Bonnet obtient le prêt de moteur Renault revu par Gordini avec des boites Renault à quatre rapports. Mais c’est surtout sur l’aérodynamique que va jouer René Bonnet, avec l’aide de Bréguet et de sa soufflerie située à Velizy. La Djet voit ainsi sa poupe rallongée, des sabots d’aile sont placés derrière les arches de roues avant, les prises d’air latérales sont effacées pour faciliter l’écoulement de l’air. Ainsi naissent les René Bonnet Aérodjet, leur coefficient de pénétration dans l’air est mesuré à 0,21 !
Mais voilà, pour cette édition des 24 heures du Mans, Alpine débarque avec sa M63 et avait pu jouir de plus de liberté dans la mise au point mécanique de sa voiture. Lors des essais, la M63 d’Alpine file à plus de 230km/h, l’Aerodjet ne peut suivre avec ses 210km/h. Quatre Aerodjet prennent le départ de l’épreuve Mancelle et un barquette de l’édition précédente munie d’un toit. Cette édition est une hécatombe, quatre des René Bonnet ne voient pas l’arrivée, seule l’Aerodjet n°53 avec l’équipage Beltoise-Bobroski termine l’épreuve à la 11ème place au générale, elle est d’ailleurs la seule voiture française classée cette année là et remporte le prix de la performance, de peu devant la Ferrari 250P qui termina en tête. L’Aerodjet qui remporta l’indice de performance en 1963 était équipée d’un moteur Renault de 1.108cm3 de 85Ch.
Fort de ce titre, l’équipe René Bonnet revient aux 24 heures du Mans 1964 avec quatre Aerodjet qui concourent en catégorie Prototype avec un moteur Renault-Gordini double arbre à came développant 107Ch, et une Aero GT avec le 1.108cm3. Les Aérodjet 1964 se différenciaient des versions précédentes par leurs imposant carénage sur les roues arrières. Seule une René Bonnet termine les 24 heures cette année là, l’Aero GT qui figure à la 23ème place. Quant à l’indice de performance énergétique, c’est Alpine qui remporte la mise cette année là. L’aventure des Aerodjet s’arrête quelques semaines plus tard à Reims, peu de temps avant que René Bonnet, criblé de dette, ne doit son salut qu’à Matra qui aura vite fait d’effacer la marque René Bonnet…