En 1975, le constructeur Peugeot prend le contrôle de son rival Citroën, un mariage arrangé par les hommes politiques afin d’éviter de voir ce fleuron de l’industrie tomber dans les mains de capitaux étrangers. Pourtant, les deux constructeurs n’ont rien en commun, l’avenir de Citroën semble compromis… Le premier acte de cette union, la présentation de la LN rapidement devenue LNA, semble aller dans ce sens…
Au début des années 1970, Citroën est dans une mauvaise posture financière, l’entreprise qui a fait de l’innovation son cheval de bataille a dépensé à tout va au cours des années 1960 sans pour autant proposer de véritables nouveautés dans sa gamme. La Citroën GS arrive en 1970 après une gestation difficile, le rachat de Maserati pour donner naissance à la SM s’avère un fiasco avec la première crise pétrolière (lire aussi : Citroën SM), quant au moteur rotatif, pas vraiment au point, il porte un coup important à l’image de Citroën. Pour ce qui est du reste de la gamme, le double chevron navigue principalement avec la 2CV et la DS, des modèles anciens; la CX présentée en 1974 apporte un véritable renouveau mais il est trop tard pour relancer la machine, Michelin était déjà depuis quelques années dans l’idée de se séparer de Citroën…
La base : Peugeot 104 Z
Dévoilée lors du salon de Paris 1973, la Peugeot 104 Z est la déclinaison trois portes de la petite sochalienne. C’est cette version qui prête sa base à la réalisation de la Citroën LN.
Devenu propriétaire de Citroën, Peugeot se donne le défi de relancer le double chevron et pare au plus pressé : moderniser la gamme du constructeur. Une rapide analyse du marché, encore marqué par la crise pétrolière, démontre que Citroën n’est pas pourvu en petite voiture économique de conception moderne. Il y avait bien les 2CV et Dyane qui avaient vu leur vente bondir avec la crise pétrolière, mais ces dernière visaient un marché rural et n’étaient pas à même de rivaliser avec les Renault 5 (lire aussi : Renault 5) et autres Fiat 127. Peugeot avait la 104, elle servit de base pour développer cette nouvelle petite Citroën, la LN, dévoilée en 1976.
La Citroën LN est un drôle d’assemblage qui n’arrive pas à cacher son origine. La caisse, reprise à la Peugeot 104 Z, intègre de nombreuses pièces piochées dans la banque d’organes Citroën pour réduire les coûts, c’est ainsi des phares de Dyane qui sont montés dans la face avant. Sous le capot, les ingénieurs Citroën travaillent pour adapter le train avant et le berceau moteur au bicylindre de l’Ami8 (lire aussi : Citroën Ami8), le 602cm3, dont la puissance est portée à 32Ch. Classée dans la catégorie des 3CV fiscaux, la LN permet aussi de bénéficier de la « petite vignette ». Ouf, l’honneur est sauf pour Citroën.
Dans l’habitacle, la Citroën LN hérite du tableau de bord de la Peugeot 104 mais Citroën lui offre un volant monobranche, la signature de la marque. La voiture reçoit également les comodos de la 2CV, un levier de vitesse au plancher avec un pommeau noir en forme de boule. L’habitacle de la LN marque par la pauvreté de ses équipements : absence d’appuie-tête ou de pré-équipement radio, simple sangle pour fermer les portes en lieu et place d’une poignée… En revanche, la LN marque des points avec sa banquette rabattable qui permet de doubler le volume du coffre. Quelques options permettent d’augmenter le confort, notons la lunette arrière dégivrante, les ceintures de sécurité à enrouleur ou encore l’embrayage centrifuge.
Proposée à 17.500 Francs dans sa version de base (un prix quelque peu élevé par rapport aux prestations), la Citroën LN est accueillie sans plus d’enthousiasme de la part du public, la LN n’arrive pas à cacher ses origines et fait office d’enfant honteux dans la gamme. Même Citroën ne croyait pas tellement en ce modèle, la production des LN est lancée avec un rythme très bas… Mais la LN arrive à décrocher quelques ventes qui, sans être exceptionnelles, arrivent à saturer les carnets de commandes de la voiture. Pour autant, la Citroën LN est loin d’être un succès…
En novembre 1978, Citroën donne de nouvelles armes à sa petite voiture qui devient au passage LNA, avec un léger restylage : nouvelle calandre, pare-chocs plus enveloppant et en plastique, rétroviseurs aux nouveau dessin… Sous le capot, le bicylindre Citroën voit sa puissance augmentée à 36Ch, le couple fait lui aussi un bond en avant, et surtout, l’allumage électronique fait son apparition. En option, la Citroën LNA peut recevoir le quatre cylindres en ligne de la Visa, un petit 1,1 litres de 50Ch. C’est la véritable nouveauté de la LNA ! Mais cette même Visa (lire aussi : Citroën Visa), dévoilée en 1979, fit du mal à la carrière de la LNA…
Sur les millésimes qui suivent, Citroën améliora l’équipement avec l’arrivée du compteur kilométrique journalier en 1980, suivi de la lunette dégivrante proposée de série en 1981 en même temps qu’un rétroviseur intérieur avec position jour/nuit. La gamme LNA s’enrichit d’une version Club en 1982 qui reçoit, outre une décoration extérieure spécifique, un intérieur beige et un pré-équipement radio. En revanche, les appuie-tête ne sont toujours pas au programme…
L’année suivante, la Citroën LNA reçoit de nouveau pare-chocs plus proéminents, des nouvelles baguettes latérales (dont un enjoliveur sur la custode) et de nouvelles optiques. Sous le capot, la LNA abandonne définitivement son bicylindre au cours de cette année 1983. L’habitacle reçoit aussi quelques évolutions avec, entre autre, une nouvelle console centrale, des plastiques colorés qui améliorent la finition, un volant redessiné et des fauteuils au confort amélioré. Surtout, les appuie-tête sont désormais au programme mais en option. Pour dynamiser les ventes, la LNA Canelle, série limitée à 2.000 exemplaires, est lancée.
Mais dès lors, la carrière de la LNA resta très discrète, il faut dire que le marché automobile avait vu l’arrivée de nombreuses rivales : Peugeot 205, Ford Fiesta, Volkswagen polo, Opel Corsa, et bientôt la Renault Supercinq… Citroën laissa vivre sa petite LNA avec un équipement qui frôle le luxe en fin de carrière : appuie-tête, vitre électrique, pré-équipement radio. Une version LNA 11 RS apparaît en 1985 avec une boite de vitesses étagée pour grappiller quelques km/h en vitesse maximale. En 1985, le sort de la LNA est désormais jeté, la production s’arrête tandis que les stocks sont écoulés jusqu’en 1986. A sa place, la Citroën AX prend sa place et semble déjà plaire au public (lire aussi : Citroën AX)…
Avec 353.383 exemplaires (dont 129.611 LN et 223.772 LNA), cette petite Citroën n’est pas à proprement parler un échec commercial puisqu’elle a permis de trouver de nouvelles débouchés à la Peugeot 104 qui s’est écoulée à 1,6 millions d’exemplaires. Si la LN et la LNA résultent du mariage forcé entre Peugeot et Citroën, elle est la première pierre du groupe qui allait ensuite partager ses bases, tout en conservant la philosophie propre de chaque marque. reste que la LN et LNA, solution trouvée dans l’urgence, est une voiture boudée et reniée par les Citroënistes…