L’annonce du retour du Grand Prix de l’ACF pour la saison 1912 fait réactiver le service courses de Peugeot. Pour concevoir la voiture de cette saison, il y a querelle entre les ingénieurs Peugeot et les pilotes, il en sortira la Peugeot L76, une fabuleuse machine à gagner…
En septembre 1911, des rumeurs veulent que le Grand Prix de l’ACF, mis en sommeil depuis 1909, puisse se courir sur la saison 1912. Robert Peugeot se fait confirmer la nouvelle et décide de remonter le service compétition de la marque, l’une des premières décision fut de s’assurer la fidélité des pilotes de la maison, Boillot, Goux et Zuccarelli, avant qu’ils ne partent à la concurrence, alors on leur propose un contrat de trois ans avec la maison Peugeot et des primes calculées selon les résultats. Très rapidement, lorsqu’il s’agit de réfléchir sur la voiture de la saison 1912, les dissensions naissent entre les ingénieurs Peugeot et les pilotes. Les premiers veulent préparer une voiturette de série adaptée à la compétition, quand les seconds veulent profiter de la règlementation qui autorise les moteurs jusqu’à 15 litres de cylindrée pour disposer d’une véritable voiture de course.
Le conflit est poussé à son paroxysme, les ingénieurs refusent les demandes des pilotes et décrédibilisent leurs propositions en les surnommant « charlatans ». Et voilà les trois pilotes de l’équipe Peugeot partir à la rencontre de Robert Peugeot pour le convaincre de leur vision de la voiture de course. Robert Peugeot accepte le défi, mais pour ne pas froisser les ingénieurs de la maison, l’équipe se base dans les anciens ateliers Rossel Aviation à Suresnes, dans la banlieue ouest de Paris. Là, l’équipe des Charlatants doit travailler dans le plus grand secret et, sur les conseils de Robert Peugeot, s’entoure de l’ingénieur Ernest Henry ayant précédemment officié sur les moteurs d’avions Picker-Moccan. Ce dernier saura concevoir un moteur selon les préceptes de l’équipe de pilote pour donner naissance à un moteur à double arbre à cames. Il s’agit d’un quatre cylindres de 7,6 litres de cylindrée avec quatre soupapes par cylindre disposées en V. Avec une puissance initiale dans les 180Ch, les bougies ne résistent pas et poussent l’équipe à réduire la puissance à 148Ch.
Le moteur est monté sur un châssis très classique mais allégé. Surtout, à puissance donnée, la Peugeot est plus légère que ses concurrentes, elle devient rapidement la voiture à battre. Lors de son premier engagement sportif au Grand Prix de l’ACF, les 25 et 26 juin 1912, la Peugeot L76 pilotée par Georges Boilot se classe sur la première place du podium. Le 11 août à la course du Mont Ventoux, une nouvelle victoire. Et ainsi de suite… On retrouve la Peugeot L76 en mars 1913 sur le circuit de Brooklands avec une carrosserie profilée pour battre des records. La voiture part ensuite aux Etats-Unis où, le 30 mai 1913, Paul Goux remporte les 500 Miles d’Indianapolis sur une Peugeot L76 dont la cylindrée du moteur est ramenée à 7,3 litres. Une première pour une voiture européenne, Peugeot connait la consécration de chaque côté de l’Atlantique.
Après cet exploit, la Peugeot L76 continue sur sa lancée, elle recevra au cours de la saison 1914 des moteurs de différentes cylindrées. Mais la concurrence s’est affutée et les nouveaux moteurs essuient des problèmes de fiabilité. Peugeot remporte quelques courses de côte en 1914 et termine sur la seconde place aux 500 Miles d’Indianapolis. L’arrivée de la Première Guerre Mondiale stoppe l’élan de la Peugeot L76 qui va continuer son palmarès aux Etats-Unis jusqu’en 1916.