En rachetant les actifs d’AMC à Renault en 1987, Chrysler se retrouve avec les anciens produits Renault développés pour les Etats-Unis, parmi lesquels la Renault Premier. Rapidement intégrée dans la gamme d’une nouvelle marque créée pour l’occasion, la Premier se transforme en 1990 en Dodge Monaco…
Dans la seconde partie des années 1980, Renault tente de pérenniser sa présence aux Etats-Unis et lance le développement de plusieurs modèles adaptés à ce marché, parmi lesquels figure la Premier, une berline haut de gamme équivalent à notre R25 européenne (lire aussi : Renault Premier). Celle-ci est dévoilée au public quelques semaines avant l’annonce de la cession d’AMC, la branche américaine de Renault, à Chrysler, au tout début de l’année 1987. Chrysler hérite donc des produits Renault et ne peut stopper leur commercialisation, AMC ayant l’obligation d’acheter à la Régie Renault 260.000 moteurs PRV, seules la Medallion (lire aussi : Renault Medallion) et la Premier pouvaient en être équipées.
Chrysler est donc contraint de continuer la commercialisation de ces deux modèles, un peu contre son gré d’autant que ces deux modèles entrent en concurrence directe avec les produits estampillés Chrysler. Pour ne pas brouiller les pistes, le constructeur américain créée une nouvelle marque, Eagle, dont la gamme est constituée des Medallion et Premier, complétée de quelques Mitsubishi rebadgées. Mais la sauce ne prend pas auprès du public américain, les ventes d’Eagle demeurent dérisoires et ne permettent pas d’écouler le nombre de PRV requis dans les contrats cadre entre Renault et AMC.
Comme la Renault Premier, devenue Eagle Premier, présentait une bonne base sur le plan technique, et sa commercialisation sous la marque Renault étant anecdotique au point d’être quasiment oubliée, Chrysler décide de commercialiser le modèle sous la marque Dodge pour en faire un haut-de-gamme remplaçant la Diplomat, arrêtée en 1989 sans descendance, et se place juste au dessus de la Dodge Spirit. La voiture prend la dénomination Monaco, arrêtée une décennie plus tôt, et se lance dans les concessions Dodge en 1990. La Dodge Monaco voit sa face avant légèrement modifiée ainsi que les optiques arrière.
Pour la motorisation, seul le V6 PRV est proposé sur la Dodge Monaco, dans sa version 2.975cm3 pour une puissance affichée de 150Ch. Le PRV est accolé à une boite automatique à quatre rapports ou encore, au choix du client, à une boite manuelle à cinq rapports. Côté performances, la Dodge Monaco est annoncée pour 194km/h en vitesse de pointe, le tout pour une consommation moyenne de 11,8 litres aux 100km. Hélas, malgré le badge Dodge, la clientèle ne s’y trompe pas et voit bien en cette voiture une Renault, un frein pour certains clients qui ont toujours en tête la fiabilité des Renault Alliance.
Si la Dodge Monaco, comme les Eagle, est assemblée dans l’usine de Brampton au Canada, profondément modernisée en 1986 par AMC-Renault, la voiture souffre, outre de l’origine de son moteur, d’un positionnement délicat dans la sphère Chrysler : la Dodge Monaco est proposée plus chère que l’Eagle Premier équipée du même moteur, elle n’est pas disponible avec le quatre cylindres en ligne alors que cette version, chez Eagle, arrive à s’écouler auprès des sociétés de location et intègre les flottes d’entreprises.
En définitive, la Dodge Monaco ne prend pas auprès de la clientèle, la voiture souffre de son origine Renault et son positionnement, présentée comme une rivale aux Audi 80 et Acura Legend, ne lui permet pas de tenir la comparaison. Deux ans après son lancement, Dodge cesse la commercialisation de la Monaco, et on ne peut pas dire que la Monaco fut une réussite : 7.153 exemplaires vendus en 1990, 12.436 en 1991 et seulement 1.960 en 1991. Toutefois, la plateforme de la Monaco (ou de la Premier) fut par la suite réutilisée pour donner naissance, en 1992, au trio Dodge Intrepid, Chrysler Concorde et Eagle Vision.