Dans les années 1920, les constructeurs se livrent une course acharnée aux records de différents types, avec le record de vitesse comme principal vecteur publicitaire. Cette quête est encouragée au cours de cette décennie par l’apparition des anneaux de vitesse, c’est en 1924 que l’autodrome de Linas-Montlhéry et celui de Miramas sont construits. Renault participe à cet affrontement avec la Renault 40Cv…
Le circuit de Montlhéry est en France le théâtre d’affrontements entre les marques qui s’y battent à coup de chronomètre. Renault y aligne le fleuron de la gamme, la 40Cv et son moteur de 9 litres de cylindrée. Une première campagne est organisée le 11 Mai 1925 par les pilotes J.A Garfield et Robert Plessier, ils remportent les records du monde de vitesse moyenne sur trois heures, 500km et 500 miles avec une Renault 40 CV Type ML à carrosserie sport ouverte.
Un second galop est effectué les 3 et 4 Juin 1925, toujours à Montlhéry avec les mêmes pilotes, cette-fois ci pour rouler durant 24 heures. Les deux pilotes couvrent ainsi 3.384,759km sur cette période, ce qui donne une moyenne de 141,331km/h, nouveau record dans cette catégorie. Lors de cette même tentative, le record au tour est battu avec un moyenne de 178,475km/h, une différence de vitesse avec les 24h qui s’explique par les nombreux arrêts de la voiture pour ravitailler, et surtout changer de pneus (la voiture en consomma plus d’une centaine sur les 24 heures).
Mais en Septembre 1924, une Bentley rafle les records de la Renault 40Cv, J.A Garfield et Robert Plessier tentent de répondre mais ils subissent une avarie mécanique au bout de 15 heures de course. Maigre lot de consolation, l’équipe remporte six records à une moyenne horaire approchant des 160km/h.
A Boulogne-Billancourt, le projet 40CV des Records est porté par une petite équipe d’ingénieurs, et les résultats de Bentley poussent cette équipe à aller encore plus loin. En effet, les ingénieurs pensent que la Renault 40Cv est capable de performances encore meilleures. Par conséquent, pour les prochains essais, Renault développe une 40Cv avec une carrosserie réalisée sur un châssis sport.
Et comme le record ne tient pas qu’à la voiture mais aussi à toute une équipe, Renault entraîne ses équipes de mécaniciens afin d’optimiser les arrêts ravitaillement : pas plus de 50 secondes pour changer les roues, mettre de l’essence et effectuer les autres opérations nécessaires ; pour cela, chaque équipe est constituée de 14 préposés : deux pour chaque roue, un pour le niveau d’huile, un autre pour le niveau d’eau, et un coordinateur. Les trois derniers s’occupent de l’essence et doivent mettre 110 litres dans le réservoir de la voiture à l’aide d’une pompe à main.
Ainsi, en 1926, Renault termine la 40Cv Spéciale Type NM prévue spécialement pour battre les records. Pour améliorer la vitesse de pointe, la voiture est équipée d’une carrosserie monoplace aérodynamique et fermée, réalisée en simili-cuir tendu sur une armature en bois pour réduire le poids (système Weymann). La voiture s’écarte aussi du style des Renault contemporaine, puisque la face avant du capot reçoit une calandre ouverte, une première pour la marque (auparavant, le refroidissement entrait par les côtés du capot).
Aussi, pour permettre un capot affûté, le radiateur est placé derrière le moteur comme Renault le faisait auparavant sur ces modèles à capot « alligator ». Pour le reste de la fiche technique, cette Renault 40CV des Records était équipée d’un six cylindres en ligne de 9.121cm3, la transmission était faite aux roues arrières et la voiture s’équipait d’une boite à trois rapports. Pour freiner le tout, la voiture est équipée de tambours sur les seules roues arrière. Au final, la voiture affiche un poids dépassant les deux tonnes, mais est capable de rouler jusqu’à 200km/h.
La voiture s’aligne le 23 février 1926 sur le circuit de Montlhéry, pilotée par J.A Garfield, la voiture s’empare de plusieurs records du monde : les 100km effectués en 31 minutes et 46 secondes, donnant une vitesse moyenne de 188,867km/h. Le 19 mars 1926, la voiture reprend la piste pour rafler les records des 500km et celui des trois heures (536,659km parcourus).
Mais surtout, les 9 et 10 Juillets, les pilotes J.A Garfield, Robert Plessier et Paul Guillon pulvérisent les records des 24 heures en parcourant 4.167,578km à une vitesse moyenne de 173,649km/h. Et la voiture empoche par la même l’ensemble des records de 500 à 4000km, ainsi que ceux des 1000 et 2000 miles.
Aujourd’hui, la Renault 40CV des Records n’existe plus, toutefois, une réplique a été réalisée en 1969 sur la base d’un châssis de Renault 40Cv par une équipe qui comprenait notamment des ingénieurs ayant travaillé sur l’originale. La voiture avait été réalisée pour le compte du musée de Clères (du côté de Rouen) qui a fermé, la voiture ayant été rachetée par Renault pour l’intégrer à sa collection, dans laquelle elle demeure aujourd’hui.