La Citroën 2CV fait partie de ces voitures « banales » que l’on croise dans les rassemblements, voire même dans la rue. Pour autant, on ne se lasse jamais de sa bouille qui plait à toutes les générations. Et même si la 2CV est un modèle courant dans l’automobile ancienne, il y a certains exemplaires qui valent le détour par leur rareté, leur spécificité. Tel est le cas de la 2CV que nous vous présentons dans cet article, puisqu’il s’agit d’une 2CV AZAM de 1965 qui est équipée du kit « ENAC ».
Avec plus de cinq millions d’unités commercialisées et une côte d’amour rarement égalée pour une voiture ancienne, l’histoire de la 2CV est connue par le plus grand nombre. A toute fins utiles, il peut être bon d’en rappeler les grandes lignes. La 2CV est issue du projet TPV insufflé par les nouveaux propriétaires de Citroën depuis 1935, les Michelin, qui souhaitaient une petite voiture rudimentaire afin de mettre les classes populaires, et notamment les agriculteurs sur roues; avec une idée derrière la tête : en écoulant plus de voitures, Michelin produira plus de pneumatiques. Si le projet TPV est finalisé en Août 1939, il ne verra jamais le jour à cause de la seconde guerre mondiale. Une chance dira-t-on, qui permet à Citroën de peaufiner sa petite voiture. Présentée au salon de Paris de l’année 1948, tout le monde critique la 2CV, un avenir sombre lui est même prédit par le plus grand nombre. Et pourtant, les commandes afflueront en masse chez Citroën, qui ne parviendra jamais, dans les années 1950, à produire autant de 2CV que la demande…
Citroën aurait pu se reposer sur ses lauriers et laisser la clientèle venir en nombre acheter la 2CV, mais la firme aux chevrons préfère écouter ses clients et améliore la 2CV en conséquent. C’est ainsi que de la Type A, l’on passe à la Type AZ en 1954 afin de proposer un meilleur équipement mais surtout, quelques chevaux supplémentaires. Suivent dans la même optique les « AZL » et AZLP » les années suivantes. Puis en décembre 1960, arrive le nouveau capot qui abandonne la tôle ondulée.
Quelques critiques persistent sur la 2CV, dont notamment le trou dans la boite de vitesses entre le 2ème et le 3ème rapport. Citroën ré-étage la boite en Février 1963, et dote la 2CV d’un moteur encore plus puissant (18Cv), c’est la 2CV Type AZA. Et de la AZA à la AZAM, il n’y a que quelques semaines qui séparent ces deux modèles. L’AZAM est en effet présentée courant Mars 1963, elle se démarque par son équipement luxueux repris en grande partie sur l’Ami6, que nous détaillerons plus tard dans l‘article.
Puis vient ensuite le millésime 1965, dont fait parti la 2CV AZAM de cet article. Cette année fait office de transition pour la petite Citroën, puisque en Décembre 1964, elle abandonne les portes « suicide » afin d’avoir des portes s’ouvrant dans le même sens pour se conformer aux nouvelles règlementations en matière automobile. Puis au courant de l’été 1965, l’AZAM reçoit quelques modifications, outre une calandre en aluminium à trois barres, l’AZAM s’équipe désormais de deux vitres de custodes qui permettent de faire entrer plus de lumière dans l’habitacle, ce qui sera repris par les autres versions de la 2CV par la suite. Quant à la 2CV de notre article, ayant les portes à ouverture « conventionnelle » et n’ayant pas les vitres de custode, elle fait parti des rares exemplaires de transition !
Comme nous l’avons évoqué, l’AZAM incarne donc le rôle de version haut de gamme des 2CV, elle est la première réaction de Citroën face à Renault qui venait de présenter la R4, qui était mieux équipée et qui détournait la clientèle de la petite Citroën. Ainsi, pour rendre crédible la 2CV, Citroën améliore son aspect avec des bananes de pare-chocs en inox (élément spécifique à l’AZAM), mais aussi avec des joncs chromés sur les bas de caisse et autours des vitres ainsi que sur les pare-chocs; un jonc en aluminium sur le capot, et sans oublier des nouvelles poignées de porte. Pour parfaire l’ensemble, Citroën dote l’AZAM des enjoliveurs de l’Ami6.
Mais comme le luxe ne se résume pas qu’à l’extérieur, l’habitacle reçoit aussi divers équipements tels que des banquettes recouvertes d’un tissu rouge à l’apparence très chic s’inspirant de celles de l’Ami6, des contre-porte garnis, un volant de marque Quillery de couleur blanche à l’instar des commodes placés derrières le volant. Les passagers disposent également d’un plafonnier avec interrupteur intégré. Et enfin, une glace de courtoisie prend place dans le pare-soleil passager. Le grand luxe !
Avec cet équipement, et avec un prix inférieur à la Renault 4, l’AZAM trouve rapidement son public et permet à Citroën de conserver une partie de sa clientèle. L’AZAM fut produite jusqu’en 1967, cette année, l’AZAM export la remplace avant que n’apparaissent les 2CV4 et 2CV6…
En plus d’être une AZAM de 1965, la 2CV de cet article dispose du kit ENAC. Mais qu’est-ce donc ? Il s’agissait d’un kit proposé en option chez Citroën afin de transformer la 2CV AZAM en une voiture mixte, une voiture particulière qui devient en quelques mouvements un véhicule utilitaire. Pour cela, la société Enac a développé un kit qui comprend un plancher arrière plat en ajoutant une tôle pour combler l’espace destiné à la roue de secours, qui par conséquent, se loge dans le compartiment moteur sur un support spécifique. La banquette arrière est repliable afin de dégager rapidement un espace de chargement de 1,25m3. Et enfin, un système permet de transformer la porte de malle en un hayon s’ouvrant jusqu’au dessus de la lunette arrière.
Ce kit ENAC fait l’objet de débats entre les passionnés, pour certains, il s’agit un véritable luxe, tandis que pour d’autre, il s’agit d’un gadget sans aucune véritable utilité, si ce n’est le système du hayon qui aurait la fâcheuse tendance à découper les capotes. Etant passionné des accessoires d’époque, ce kit est un petit plus afin de se démarquer, et la banquette repliable, très simple d’utilisation est un vrai plus.
Et si nous partions faire un petit tour avec cette 2CV ? Avant cela, un petit descriptif de cette voiture, qui se trouve dans son jus, la peinture affiche une très belle patine et par endroit, une « fleur de rouille » apparait, notamment sur la porte de malle, de quoi ravir les passionnés d’authenticité. C’est donc dans une voiture dans son état d’origine et disposant de tous ses éléments spécifiques que nous pénétrons. L’habitacle n’est pas en reste avec ses superbes banquettes de couleur rouge, le tissu est légèrement passé mais le rouge reste vif et rend chaleureux cet intérieur, sans doute ont-il déjà été refait au vu de leur état.
Prenant place face au volant, je suis surpris de voir, outre le volant et les comodos blancs, que le tableau de bord est lui aussi blanc (ça change de mon AK400...). Pas besoin de s’attacher non plus, les premières AZAM n’étaient pas équipées de ceintures, il faut attendre la fin de l’année 1965 pour voir apparaitre les ceintures deux-points. Aller, démarrons cette auto, tirette de starter sur la gauche, puis celle du démarreur sous le levier de vitesse, quelques coups de pompe sur l’accélérateur et voilà le bicylindre qui s’ébroue.
Le moteur, nous ne l’avons que peu évoqué, alors présentation : le petit bicylindre à plat cube seulement 425cm3 et développe 18 Chevaux ! Aucun risque de s’envoler avec une telle cavalerie, Citroën annonce tout de même un 96km/h en vitesse de pointe. Enfin, ce moteur est accolé à une boite à quatre rapports, ou plutôt trois rapports et une surmultipliée en réalité. Pour la petite histoire, Pierre-Jule Boulanger, directeur de Citroën, souhaitait que la 2Cv ait une boite à trois rapports, tandis que les ingénieurs avaient optés pour une boite quatre. Face au refus du patron, les ingénieurs finissent par le convaincre en appelant la quatrième vitesse « 3ème surmultipliée ». Et l’on retrouve encore les fruits de cette querelle sur l’AZAM puisque sur la grille des vitesses, la quatrième est mentionné par un « S ».
Mais arrêtons les discussions et partons sur nos routes. La voiture s’élance dans une certaine lourdeur, comme toutes les « vieilles » 2CV, l’accélération n’est pas vive mais le moteur en veux. J’oubliais, cette 2CV est équipée de l’embrayage centrifuge qui dispense de débrayer pour passer les premières vitesses ! Et ça tombe bien car la première est très courte et plafonne aux environs de 20km/h, la deuxième vitesse permet d’atteindre les 40km/h pour enfin passer la troisième, puis la « quatre » … Pour l’instant, on reste bloqué aux alentours des 70km/h du fait de la limitation, mais un peu plus loin, la voie est libre et on titille désormais les 90km/h. Le petit bicylindre est vaillant et utilise toute la puissance disponible pour nous amener à une telle vitesse sans pour autant avoir l’impression que le moteur force…
Si le moteur pourrait indéfiniment rouler à cette vitesse, les côtes nous rappellent vite la faible puissance du moteur, et voilà l’aiguille du tachymètre qui redescend, au point d’avoir à repasser la troisième sur les plus grandes côtes. Mais ne nous plaignons pas, l’AZAM fait bien mieux que ces aînées AZ, et je ne vous parle pas de la Type A…
Question confort, les banquettes de l’AZAM sont légèrement plus confortables, puisque s’inspirant de l’Ami6, celles-ci sont rembourrées. Le bruit du moteur, que l’on ne saurait dissocier de la 2CV, participe à faire vivre le mythe mais peut s’avérer pesant sur des longs trajets. Bref, on est dans une 2CV, le début des 2CV modernes et confortables…
Aller, si l’on ne devait citer qu’un défaut avant de quitter cette voiture, ce sont les nombreux à-coup que donne la voiture quand on la manie à faible vitesse… le défaut lié à la construction de la transmission, puisque non équipées de cardans à joint homocinétiques. Cet effet « balançoire » est des plus désagréables, notamment lors de créneaux ou de changements de direction à vitesse réduite…
Les +
_ Charme de la 2CV
_ Entretien simpliste
_ Pièces de rechange faciles à trouver
_ Premières deuches utilisables au quotidien
Les –
_ Côte en hausse
_ Kit ENAC mangeur de capote
_ Effet balançoire lors des manoeuvres
L’avis d’Alex
Ah la 2CV, qui n’a jamais rêvé d’en avoir une ? Vous peut-être, qui la trouvez trop banale sur les rassemblements ! Et pourtant, derrière leur ressemblance, certains modèles de 2CV valent le coup d’œil à cause de leur équipement d’origine dont certains accessoires sont rarissimes, pour ne pas dire introuvable. Le kit ENAC n’est pas des plus rares mais à le mérite d’exister et de rendre encore plus fonctionnelle une voiture qui l’était déjà bien assez. Et que dire de la roue de secours reléguée dans le compartiment moteur, tant de deuchistes auraient aimé la même chose après une crevaison le coffre chargé… Mais avouons-le, ce kit a quand même certains défaut que nous avons listé au fil de cet article. Bref, la prochaine fois que vous voyez une deuche, attardez-vous sur les détails…
Remerciements à l’ancien propriétaire de cette 2CV et à l’équipe du Relais de l’auto ancienne pour la mise à disposition de cette voiture le temps d’un essai et des prises de vue.
J’ai possédé exactement ce même type de 2 CV AZAM (Couleur gris ardoise – comme celles-ci) mais modèle 1964 avec les portes suicides. Achetée d’occasion en
1968 elle était ma première voiture. Je l’avais équipée d’un klaxon italien 3 tons et de phares longues portées. Ensuite je l’ai vendu en bon état début 1972. Auparavant quelques semaines plus tôt, je me suis laissé tenter par une Matra René Bonnet Djet 5 s de 1966, motorisée avec un 1100 Gordini (une autre aventure….) Je regrette ma petite Citroën.
Bonjour
Merci de cette évocation de la 2cv enac dont j’ai possédé un exemplaire: ce kit était un vrai plus.
Par contre l’embrayage centrifuge n’a jamais au grand jamais permis de passer les vitesses sans débrayer puisqu’il ne débrayait automatiquement qu’au régime de ralenti: il permettait seulement dans les embouteillages sur la 1ere ou la 2eme de progresser en accélérant légèrement et en freinant si nécessaire pour suivre les à coups de la circulation, et ceci sans toucher à la pédale d’embrayage.
sitôt en régime normal au delà de 1000 tours cet embrayage restait collé et les vitesses se passaient en débrayant ainsi d’ailleurs que le préconisait la notice .
Un inconvénient de taille: seul le frein à main permettait d’immobiliser la voiture et le démarrage à la poussette était impossible car le moteur ne tournant pas l’embrayage centrifuge restait débrayé.