Dans les années 1970, Bertone connait son heure de gloire en signant de très nombreuses sportives italiennes, et obtient un contrat avec Ferrari, chasse gardée de Pininfarina, pour concevoir une voiture à moteur V8, la Dino 308 GT4. Hélas, la réussite ne fut pas au rendez-vous, en parti à cause du design clivant de la voiture…
Depuis 1968, Ferrari commercialise une voiture à moteur V8 sous la marque « Dino » afin de conserver le prestige des « vraies » Ferrari à moteur V12, initialement avec la Dino 206GT qui devient rapidement 246GT. Le succès est au rendez-vous avec plus de 3.900 exemplaires pour ces deux versions, mais en octobre 1973, Ferrari décide que la Dino 246 GT a fait son temps. Depuis quelques mois, la firme de Maranello envisage l’arrivée d’une nouvelle Dino, c’est finalement le premier choc pétrolier qui cause un effondrement des ventes des Ferrari qui fait réfléchir Ferrari. Après tout, les Maserati Merak et autres Lamborghini Urraco ne nuisent pas à l’image de leur marque.
Pour concevoir cette nouvelle Dino, Ferrari fait appel à Bertone pour la première fois sur une voiture de série (quelques Ferrari avaient été carrossées par Bertone depuis les années 1950 mais restaient des initiatives personnelles de clients ou des prototypes) puisque Pininfarina avait fermement décliné le projet de Ferrari, jugeant qu’il lui était impossible de réaliser un coupé 2+2 à moteur central arrière en conservant une ligne majestueuse. Bertone se charge du travail, et c’est sans surprise le styliste Marcello Gandini qui s’y colle, un jeune designer qui avait déjà a son actif l’Alfa Romeo Montreal, la Lamborghini Miura ou encore le prototype LP500 qui donna naissance à la Countach.
Hélas, lors de la présentation de la Dino 308 GT4 lors du salon de Paris 1973, la presse et le public sont divisés, les commentateurs lui reproche une ligne qui rompt avec les traditions de la marque, certains la trouvant même sans charme. Gandini réalisait une carrosserie dans l’ère du temps, en tout cas conforme à son dessin du moment en adoptant des lignes anguleuses et ne laissait que peu de place aux courbes. L’avantage, cette Dino 308 GT4 se démarque de la gamme Ferrari, Enzo n’était pas encore décidé à lui faire porter le mythique blason.
Sous cette ligne moderne, on retrouve le châssis inspiré de la Dino 246 qui fut modifié pour laisser un habitacle permettant de loger quatre personnes à son bord. Le V8 se positionne à l’arrière de la voiture et été disposé transversalement, il s’agit d’un nouveau moteur réalisé en alliage avec une cylindrée de 3,0 litres (308 : 3.0 litres et 8 soupapes), était alimenté par quatre carburateurs double corps de marque Weber et avait quatre arbres à came (d’où le GT4). D’une puissance de 250Cv, la 308 GT4 pouvait filer jusqu’à 250km/h… du moins en Europe, car aux Etats-Unis, c’est une version dégonflée à 240Cv pour les normes antipollution, qui avait été défigurée avec ses énormes boucliers.
Pour des raisons de fiscalité, Ferrari propose une version 2,0 litres de la Dino nommée 208 GT4 à partir de Novembre 1975 sur le marché italien, celle-ci se reconnait extérieurement par l’absence d’antibrouillard à l’avant ou encore la sortie d’échappement unique à l’arrière, sa puissance n’était « que » de 170Cv. Mais c’est à la fin de l’année 1976 que le grand changement intervient, la Dino 308 GT4 porte enfin le blason Ferrari, une première pour une voiture sans V8 qui mettait un terme à cette marque Dino qui ne dupait plus personne. Toutefois, cela permet de voir les ventes de la Dino 308 GT4 s’envoler…
En 1978, Ferrari adopte des pots catalytiques qui font chuter les performances de la 308 GT4, elle ne dispose plus que de 230Cv en Europe et 205Cv aux Etats-Unis. Cette modification signe la condamnation du modèle, d’autant que Ferrari avait lancé en 1975 la 308 GTB réalisée par Pininfarina dont la ligne, plus séduisante, plaisait davantage à la clientèle. C’est donc en 1980 que la Ferrari Dino 308 GT4 tire sa révérence, après 2.826 exemplaires auxquels se rajoutent 840 Ferrari 208 GT4. On ne peut pas forcément parler d’échec, mais Ferrari espérait plus du modèle et sera rassasié par la 308 GTB, produite à plus de 12.000 unités…
Pour la 308 GT4, Marcello Gandini a réutilisé un dessin fait pour la Lamborghini Urraco et que Lamborghini avait refusé, on peut donc constater une forte ressemblance entre ces deux voitures. De même pour la Maserati Khasmin dessiné par le même Marcello Gandini.
J’ai eu l’occasion de croiser une 208 GT4 il y a peu de temps, lors du rassemblement annuel de la Montée Historique de Laon