Encouragé par la mise en lumière des voitures battant le record de vitesse terrestre, Fiat décide en 1910 d’afficher son nom au tableau d’honneur et développe une voiture à l’aide d’un moteur d’aviation. La Fiat S76 naissait, si la voiture avait les compétences pour ravir le record, jamais elle n’arriva à inscrire son nom.
Le record de vitesse terrestre est une discipline sportive qui apparaît en 1898, en moins de 18 mois, l’automobile passe la barre des 100km/h, il faut ensuite attendre 1909 pour voir la barre des 200km/h tomber, franchie par le pilote français Victor Héméry au volant d’une Blitzen-Benz. Aucun moyen de locomotion humain n’avait franchi ce cap, ce qui redonne de l’attrait à ce record et inspire l’italien Fiat qui y voit un moyen d’attirer la couverture médiatique vers ses productions.
Pour cela, Fiat conçoit en 1911 une voiture capable d’atteindre une telle vitesse, à cette époque, pour développer des chevaux, la meilleure recette est de construire un moteur imposant. Ainsi, la future voiture des records de Fiat, la « S76 », s’équipa d’ue quatre cylindres en ligne de 28,5 litres de cylindrée (sic), un moteur d‘aviation qui équipe alors les dirigeables, lequel développe la puissance monstrueuse de 290Cv ! Le moteur est étonnamment moderne pour son temps avec quatre soupapes par cylindre.
Le reste de la voiture est construit autour du moteur compte tenu de ses dimensions. Ainsi, la hauteur de la voiture dépasse le mètre et demi et masquait la visibilité du pilote vers l’avant. Quatre mètre de long, quasiment deux tonnes dont une rien que pour le moteur, la Fiat Tipo S76 est une voiture qui peut impressionner. Deux exemplaires furent assemblées en 1911, les premiers essais démarrent dans les rues de Turin avec Felice Nazzaro comme pilote : la voiture crache des flammes et une épaisse fumée noire, les 290Cv sont développés à 1900 tours par minute, mais la direction devient rapidement imprévisible et les freins inexistants à haute vitesse.
Son pilote d’essai avait même qualifié la voiture « d’enfer sur roues » tant elle apparaît dangereuse et complexe à manier. Cela ne décourage pas un autre pilote italien Pietro Bordino de partir à l’assaut du record de vitesse. La voiture s’élance sur la piste du récent circuit de Brooklands au Royaume-Uni et arrive à dépasser les 200km/h, ce qui prouve que la voiture peut aller battre le record. Toutefois, sa conduite ne convient pas à la piste, c’est du côté de la plage de Saltburn-by-the-Sea en Angleterre que l’équipe trouve un lieu de repli.
L’endroit est connu pour ses courses de vitesses qui y sont organisées, mais les conditions ne sont pas optimales avec du sable battu et humide qui ralenti la voiture, qui ne signe qu’une pointe à 186km/h, bien loin du record. Mais lors de l’une des tentatives de record, Pietro Bordino perd le contrôle de la voiture à plus de 180km/h. Plus de frayeurs que de mal, la voiture s’enlise rapidement dans le sable. Pour Bordino, la frayeur est telle qu’il décide de tout arrêter sur le champ.
Il semblerait qu’une nouvelle tentative ait eu lieu à Ostende en Belgique, la Fiat S76 a réussi à atteindre la vitesse de 217km/h, ce qui lui permet de ravir le titre de voiture la plus rapide du monde. Hélas, le record n’est pas homologué car la voiture aurait du parcourir en une heure un kilomètre dans un sens et dans l’autre, hélas, la voiture n’est pas repartie dans l’heure règlementaire.
L’un des deux exemplaires de Fiat S76 est alors revendu au prince russe Boris Soukhanoff qui la ramène en Russie et tente de battre le record de vitesse en la pilotant en personne. Mais ce dernier se rend compte de la difficulté du pilotage à haute vitesse et décide de passer le relais à un pilote chevronné qu’il trouve en France, Arthur Duray. Celui-ci essaya la voiture sur la piste de Brooklands puis, compte tenu de la difficile maitrise de la Fiat S76, décide de partir à la recherche d’une ligne droite pour effectuer une tentative de record.
Le pilote français demande au Comité des Sport de l’ACF d’utiliser une route entre Arles et Salon mais cette demande est rejetée. Même tentative en Italie, et résultat identique. C’est donc sur la ligne droite d’Ostende en Belgique au début du mois de décembre 1913 que l’on retrouve la Fiat S76 aux mains d’Arthur Duray. S’il arrive à atteindre 225km/h en vitesse de pointe, les chronométrages effectués sont irréguliers en raison de capteurs défaillants, une seule piste d’enregistrement indique une vitesse moyenne de 211,661km/h, mais les doutes sont si importants que ce record ne peut être homologué. D’un autre côté, le pilote français a trouvé la piste trop court et sent la voiture capable d’aller au-delà des 230km/h, et pourquoi pas des 240km/h.
Cependant, malgré cet encouragement, la voiture ne partira plus jamais pour un galop d’essai, l’exemplaire appartenant au prince russe est revendu et trouve acquéreur au Brésil, avant d’atterrir en Australie ou elle termina sa vie avant d’être retrouvée au début des années 2000 par un passionné anglais qui a entrepris un travail de restauration terminé en 2014. Quant à l’exemplaire que Fiat avait conservé, il est rapidement démonté en 1918 après la fin de la première guerre mondiale afin d’éviter de voir la voiture tomber entre les mains des concurrents…