Face à l’important succès de l’Unimog développé par Mercedes, plusieurs tentatives de commercialiser un véhicule concurrent émergent; en France, c’est un véhicule de la Régie Renault, l’Estafette, modifiée par Sinpar qui va jouer ce rôle pour donner naissance au Sinpar Castor. Un véhicule rare que je vous propose de (re)découvrir au travers de cet historique.
En 1959, Renault présente l’Estafette, un utilitaire d’un nouveau genre à la Régie car c’est le premier véhicule à traction produit par l’entreprise. L’estafette est saluée par le public, son architecture reprise sur le HY Citroën répond à une véritable demande de la part des artisans, et sa ligne moderne permet de la distinguer d’autres utilitaires plus austères. En définitive, l’Estafette connait un véritable succès, il faut dire que Renault a développé toute une gamme autours de cet utilitaire.
De l’autre côté, l’entreprise Sinpar est spécialisée dans les transmissions à quatre roues motrices qui sont montées sur des camions Citroën dans les années 1950, mais aussi sur des Berliet, Willème et Unic pour la prospection pétrolière. Dans les années 1960, Sinpar collabore avec Renault afin de proposer la Renault 4 4×4, qui connait elle aussi un certain succès sur un marché de niche. Mais dans son principal métier, Sinpar est concurrencé par le Mercedes Unimog et cherche à développer un véhicule pour le concurrencer, et ainsi disposer de son propre véhicule mixte permettant d’effectuer des travaux agricoles que de router sur la route à vitesse soutenue.
Au cours de l’été 1965, l’administration émet une note par laquelle elle souhaite s’équiper d’un véhicule polyvalent et tout-terrain pour effectuer diverses tâches de voiries, et notamment le déneigement. Les études sont lancées en Septembre 1965, avec l’objectif de présenter un prototype répondant à ces spécifications pour le Salon de Paris d’octobre 1965. Un mois plus tard, le défi est relevé et le Sinpar Castor est présenté au grand public; il s’agit d’un véhicule compact reprenant la cabine de l’Estafette, proposé en deux empattements : 1,90 (Castor 1200) et 2,20 mètres (Castor 1500).
Le Sinpar Castor reprend beaucoup de pièces de la Régie, outre la cabine d’Estafette, les moteurs viennent de chez Saviem, les deux pont moteurs viennent du Galion. L’ensemble de ces pièces sont directement envoyées par la Régie aux ateliers de Sinpar situés à Colombes. Là-bas, les Castor y sont assemblés par une équipe composée d’une dizaine d’ouvriers et de quatre carrossiers. Les caisses d’Estafette sont modifiées afin d’accueillir les moteurs Saviem ainsi que des roues de taille plus conséquente. Les passages de roues seront arrondies sur les premiers exemplaires avant d’être échancrés en angles par la suite. Mais attention, le Sinpar Castor n’est pas une Estafette 4×4, puisque le châssis est développé par Sinpar !
Mais compte tenu que le Sinpar Castor arrive sur un marché de niche, chaque véhicule est construit à la demande. Ainsi, Sinpar permet au client de choisir sa motorisation parmi deux Diesels de 2.720 ou de 3.020cm3, ainsi qu’un moteur essence de 2.141cm3. Côté équipement, Sinpar propose en option des prises de force à l’avant ou à l’arrière, une prise de mouvement, un équipement hydraulique ou un circuit pneumatique pour tracter une remorque freinée. Mais la liste est lojn d’être exhaustive, notons également une lame de déneigement ou des godets de chargement… En somme, chaque Castor produit par Sinpar est une pièce unique afin de répondre au mieux aux besoins du clients.
Malheureusement, trop sophistiqué, le Sinpar Castor se révèle trop cher à l’achat mais aussi à l’entretien. Et en conditions tout-terrain, le Castor est pénalisé par son centre de gravité bien plus élevé que son principal rival. A cela se rajoute le manque de volonté de Renault sur la diffusion du véhicule ainsi que sur sa maintenance, et l’on obtient toutes les raisons de l’échec du Sinpar Castor. Dommage, ce petit véhicule était intéressant sur bien des points, il ne fut produit qu’à une centaine d’exemplaires entre 1965 et 1977.