En Espagne, sous l’ère franquiste, l’industrie automobile est principalement soutenue par l’Etat via l’INI, une holding qui détient le principal constructeur de voitures, SEAT, que le principal constructeur de poids-lourds, l’entreprise ENASA qui commercialise des camions sous la marque Pegaso. Cela n’empêche pas les initiatives privées, preuve en est avec le constructeur FASA, mais aussi le constructeur SAVA (pour Sociedad Anónima de Vehículos Automóviles) qui se spécialisa dans les utilitaires. La SAVA fut fondée en 1957 en reprenant les actifs de la FADA tout en obtenant davantage de capitaux, une obligation (ou une contrainte) imposée par le gouvernement pour limiter la concurrence avec SEAT . La SAVA obtient néanmoins une autorisation en 1959 pour produire des véhicules automobiles à quatre roues (jusque-là, la SAVA produisait des triporteurs) mais avec une limite de 1.000 véhicules.
Le premier SAVA fut un camion nommé P-58, à moteur Barreiros avec deux tonnes de charge utile et une cabine en fibre de verre. En 1961, la SAVA signe un accord avec l’anglais BMC qui, en contrepartie de 8% du capital du constructeur espagnol, apporte la licence de ses fourgons pour une production locale employant des moteurs Barreiros, rapidement remplacé par les moteurs anglais produit par SAVA lui-même. La production des utilitaires anglais débute dès 1962. En 1965, SAVA lance le fourgon J4, sous licence Morris J4 (lequel était un succès au Royaume-Uni), il fut proposé en Espagne avec un moteur quatre cylindres essence de 1,5 litres pour 38Ch, boite à quatre rapports qui transmet le mouvement aux roues arrière, et proposant une charge utile de 850kg.
Présenté le 28 mai 1965 et commercialisé au prix de 180.000 pesetas, le SAVA J4 s’impose rapidement comme un succès en Espagne, et devient un concurrent sérieux pour le constructeur national ENASA – Pegaso. Pour autant, en raison de contraintes administratives, SAVA souffre d’un manque permanent de liquidités et envisage une fusion avec Barreiros, un projet avorté par l’INI qui préempte 52,71% de SAVA en 1966, puis passe à 82% du capital en 1968 pour l’intégrer à Pegaso. Entre temps, des premiers SAVA J4 à logo Austin sur la face avant, rapidement troqués contre un logo « SAVA-Austin », il n’y aura plus de référence au constructeur anglais à partir de 1968. Le J4 était un véhicule très apprécié, les entreprises louaient sa bonne accessibilité au moteur, son excellente suspension et le placement correct des commandes et des indicateurs. En 1971, le SAVA J4 reçoit le tableau de bord de la Seat 124, l’année suivante, elle hérite de cette dernière la boite de vitesses qui remplace la transmission d’origine britannique, une modification qui améliore légèrement les performances du J4. Le succès commercial du J4 ne se dément pas, de 337 ventes en 1965, on passe à 2.000 unités en 1967, 5.625 en 1973, loin devant ses rivaux Ebro F-100/108 et DKW F-1000 D.
En 1974, Morris stoppe la production du J4 au Royaume-Uni, l’ENASA est donc libre de modifier le modèle espagnol et en profite pour opérer un restylage de la face avant. Le J4 adopte une calandre noire qui arbore le logo de Pegaso et des phares carrés. Les logos SAVA et J4 demeurent entre la calandre et le pare-brise. Un second restylage est opéré en 1978, le J4 désormais commercialisé sous la seule marque Pegaso adopte de nouvelles portes arrière, le tableau de bord est modernisé. On distingue un J4 post-1978 aux essuie-glaces fixés en partie basse du pare-brise et aux vitres arrière plus grandes. La charge utile est augmentée, le catalogue du J4 propose ainsi quatre versions : 700, 800, 1000 et 1100, selon la charge utile. En 1982, le J4 s’équipe de freins à disques sur les roues avant, dernière grande modification jusqu’en 1989, année durant laquelle Pegaso arrête la production du J4.