La Dauphine de Renault est proposée à la commercialisation en 1956, petite berline populaire qui vient épauler la 4CV, son succès est immédiat. Par son prix bon marché et les possibilités de développement de son moteur, la voiture intéresse de nombreux artisans-constructeurs, stylistes et mécaniciens amateurs qui vont la modifier et (tenter) de proposer des variantes au grand public.
Au milieu des années 1950, la production automobile a complètement fini sa reconstruction suite à la guerre et nombre de constructeurs ont des usines à la pointe. Renault par exemple est un expert en matière de production de masse pour sortir les populaires 4CV et la nouvelle venue, la Dauphine, dans une toute nouvelle usine située à Flins. Si la production française est alors hétéroclite (et va de la petite Rovin à la somptueuse Facel Vega Excellence), un créneau semble oublié, celui des voitures de loisirs alors occupé par les coupés et cabriolets. Certes, quelques constructeurs ont investi le segment comme Simca avec la Simca Sport ou les coupés sur base d’Aronde, Panhard avec la Junior et les cabriolets Dyna, Peugeot avec la 403 Cabriolet… Mais l’offre reste maigre par rapports à nos pays voisins.
Quand la Renault Dauphine apparaît en 1956, plusieurs carrossiers flairent le bon filon et lancent des études pour réaliser un coupé, tout en reprenant le moteur et les autres éléments mécaniques. L’objectif était de proposer une voiture de loisirs bon marché et d’investir ce segment délaissé. D’autres carrossiers réalisent des créations sur la base de la Dauphine dans l’espoir peut être de se faire remarquer par la Régie et peut-être obtenir une commercialisation du modèle.
Est-ce cette motivation qui a poussé Pietro Frua à réaliser un coupé sur base de Dauphine en 1956 ? En réalité, l’histoire est plus complexe. Avant même la présentation de la Dauphine, Renault a demandé à plusieurs carrossiers des propositions de carrosserie coupé en reprenant la base de la Dauphine. Ghia aurait été missionné par Renault et donne la mission à Pietro Frua en raison d’une exclusivité qu’avait Ghia envers Volkswagen du fait de la création du Karmann Ghia. C’est ainsi que serait apparue cette voiture, présentée lors du salon de Milan 1966 sous le nom de « Dauphine Sport ».
Les lignes de ce coupé se remarquent , relativement fluides et dynamiques, elles ont le charme des créations italiennes des années 1950. Rétrospectivement, on peut trouver un air de famille avec la Renault Floride, surtout au niveau du pavillon. La Floride arrive quelques années plus tard avec un prototype réalisé par ce même Petro Frua. La voiture reste toutefois surchargée sur ses faces avant et arrière avec une abondance de chromes et de lignes un peu trop travaillées.
Néanmoins, la voiture se retrouve quelques mois plus tard à Paris où elle aurait été immatriculée pour la première fois. On sait que cette voiture a été achetée par Jean Rédélé sur ordre des dirigeants de Renault. En effet, Jean Rédélé faisait parti des études sur le coupé Renault qui deviendra la Floride, et l’un des prototypes recalés par la Régie et réalisé par Michelloti intéresse fortement Rédélé pour concevoir un cabriolet Alpine.
Cependant, ce prototype avait été financé par Renault, les dirigeants de la Régie voyaient d’un mauvais œil apparaître une concurrente à la future Floride. Et quand Rédélé critique ouvertement ce prototype de Frua, les dirigeants de Renault ordonnent à Jean Rédélé de prendre à ses frais la possession du prototype Frua présenté 1956 et de garder cette étude sous le coude. Mais quand Renault accélère le programme Floride avec un second prototype, Rédélé peut désormais faire ce qu’il souhaite de ce prototype, qui aurait été envoyé en Cote d’Ivoire après avoir été conservé quelques années…