Si l’industrie automobile a rapidement été dominée par les grands constructeurs, les petits artisans ont parfois eu leur mot à dire, notamment sur des marchés de niche qui étaient souvent l’affaire de passionnés. Parmi ces derniers, on peut citer celui des buggy ou encore des véhicules tout-terrain. Et le véhicule que je vous présente aujourd’hui allie les deux, il s’agit du Bimoteur Muschang, nommée aussi « Renault Muschang ».
Dans les années 1960, la catégorie des buggys commence à apparaitre tout aussi bien aux Etats-Unis qu’en Europe, plusieurs sociétés se spécialisent dans ce domaine. En Belgique par exemple, la société Apal est crée en 1962 à Liège, Elle réalise des buggys sur base de Volkswagen Cox en y montant des carrosseries en polyester. Très légers, ces véhicules de loisirs peuvent aussi avoir de bonnes capacités de franchissement, de quoi participer aux compétitions tout-terrain.
C’est également au milieu des années 1960 que le concessionnaire Renault d’Arlon, en Belgique également, décide de concevoir un véhicule sur ses heures perdues afin de participer à ce genre d’épreuves. Pour cela, il récupère une plate-forme de Renault 4 et la modifie en profondeur pour monter deux moteurs de Renault 4 de 850cm3 : l’un à l’avant, l’autre à l’arrière. La voiture tient plus du bricolage, car ce proto était équipé de deux accélérateurs, de deux boites de vitesses et donc de deux leviers de vitesse montés l’un en dessous le l’autre…
Côté carrosserie, Muschang se tourne vers Apal pour concevoir une carrosserie en polyester, un matériaux à la fois léger et résistant, et y intègre divers pièces d’origine Renault : pare-brise et calandre de Renault 4, feux arrières de Renault 8, phare de R12, clignotant d’estafette… Avec ce prototype, Muschang s’engage dans diverses compétitions de tout-terrains et démontre les excellentes capacités de franchissement de son engin.
Il remporte ainsi plusieurs étapes du rallye des Cimes; la compétition européenne la plus difficile en la matière : deux sur cinq étapes sont gagnées pour l’édition 1966, une seule pour l’année 1967 mais avec une seconde place au classement général. Il participe également au Rallye Infernal, et remporte le championnat de Belgique 1967.
De conception artisanale, le Muschang Bimoteur peut être équipé d’à peu près tout les moteurs Renault de l’époque, furent ainsi monté sur ce prototype un moteur de R8 Gordini, ainsi que des moteurs de Renault 6 à double carburateurs pour certaines épreuves. Il y eu ainsi plusieurs version de la voiture; l’une d’entre elle fut même essayée parle pilote J.P Beltoise.
Face à une telle démonstration, Muschang pense trouver des débouchés pour son « buggy », et le commercialise avec l’aide d’Apal pour la carrosserie. Dans sa version civile, la Renault Muschang Bimoteur restait sage en ne prenant que deux moteurs de Renault 4, « l’un qui pousse, l’autre qui tracte » selon la publicité d’époque. La voiture était ainsi une quatre roues motrices, mais son conducteur pouvait n’enclencher que l’un des deux moteurs, au choix entre propulsion et traction.
Les moteurs avaient chacune leur boite à trois rapports, mais cette fois-ci, les boites étaient synchronisées. L’ensemble développait 60Cv, ce qui permettait à la voiture de rouler jusqu’à 130km/h, mais le plus important, de grimper sur des côtes jusqu’à 60%. A peine dix exemplaires auraient été conçus par ce biais, autant dire que l’on est face à un échec sur le plan commercial.
Plus tard, Apal et Muschang continueront leur collaboration, toujours sur la base d’une Renault 4 afin de proposer une voiture de loisirs capable de concurrencer la Citroën Méhari … Mais nous verrons ceci plus tard dans un autre article…