Un moteur de fusée, c’est mieux qu’un moteur d’avion… Voilà comment peut se résumer la Blue Flame, une voiture réalisée à la fin des années 1960 pour battre le record de vitesse terrestre quelques années après qu’il ait été pulvérisé par les moteurs à réaction…
Avec le développement des moteurs à réaction dans les années 1940 et 1950, l’automobile se met à rêver d’un nouveau type de motorisation, et plusieurs tests sont effectués comme la Chrysler Turbine qui reste le plus évolué en la matière. Rapidement, les ingénieurs remarquent que la turbine ne peut satisfaire l’automobile pour un usage habituel, mais le réacteur peut permettre de rouler à vive allure, plusieurs voitures sont donc réalisées pour battre le record de vitesse terrestre, mettant un terme aux voitures à moteur à explosion dans ce domaine. Ainsi, dans les années 1960, le record est porté de 657km/h en 1963 à 966km/h en 1965 !
Pour pousser ce record encore plus loin, une petite équipe forme en 1965 et aux Etats-Unis la société Reaction Dynamics pour développer des moteur-fusée fonctionnant au peroxyde d’hydrogène. Pour financer cette aventure, l’American Gas Association sponsorise l’entreprise et leur ouvre les portes de l’institut de technologie du gaz. Petit à petit, l’équipe met au point un moteur fonctionnant avec un mélange de peroxyde d’hydrogène et de gaz naturel liquéfié mis sous pression par de l’Hélium gazeux. Ce moteur nécessite aussi la participation de plusieurs entreprises capables de fabriquer des pièces avec une précision inégalée, sauf peut-être dans le domaine de l’aérospatiale.
Le moteur de la future voiture de record peut fonctionner avec du gaz sous forme liquide ou gazeux par un système de combustion en deux étapes : le gaz est envoyé dans un échangeur de chaleur dans lequel il se vaporise puis est porté à température de combustion, ce gaz est alors injecté dans la chambre de combustion avec le peroxyde d’hydrogène ce qui amène le moteur à pleine puissance. A pleine poussé, le moteur est capable de fonctionner durant 20 secondes, il délivre alors l’équivalent de 58.000 chevaux !
Cependant, Goodyear qui participe au record par la conception de pneumatiques spécifiques invoque l’impossibilité de produire un pneu capable de résister à une vitesse supérieureà 700mph (soit 1.126km/h). Par conséquent, l’équipe de la Blue Flame modifie l’alimentation en gaz du moteur-fusée et réduit sa poussée maximale de moitié.
Maintenant que nous avons le moteur, il faut le reste de la voiture pour effectuer le record. Son nom, ce sera la Blue Flame en référence à la couleur de combustion du gaz. La voiture est réalisée autour d’une structure tubulaire en aluminium et recouvert d’une peau réalisée elle aussi en aluminium. Cette carrosserie affiche une longueur de 11,39 mètres pour une largeur de 2,34 mètres. Quant à la hauteur, elle est de 2,477m en raison de son importante aile arrière nécessaire pour la stabilité de l’engin à haute vitesse. Et sur la balance, elle affiche un poids de 1,8 tonnes à vide moteur compris, et de 3 tonnes une fois le carburant inséré dans les réservoirs.
La Blue Flame est fin prête pour effectuer un record de vitesse à la fin de l’année 1970, celui-ci se déroulera sur le temple de la vitesse : le lac salé de Bonneville. Conformément aux règles en matière de record, la voiture devra effectuer en moins d’une heure deux essais dans un sens puis dans l’autre, le record sera obtenu par la moyenne des deux vitesses moyennes obtenue sur un miles; ceci afin de compenser la vitesse du vent. Pour la Blue Flame, comme le moteur ne peut fonctionner sur un miles à pleine vitesse (en raison de la forte consommation de la voiture), le pilote pousse le moteur dans ses derniers retranchements au début du miles et fini en roue libre pour passer la ligne de chronométrage.
Le 23 octobre 1970, l’équipe de la Blue Flame se met en place, les deux galops d’essai sont effectués, le pilote annonce une vitesse de pointe aux envions de 650 miles (soit 1.046km/h). Quelques minutes après, la moyenne tombe : 622,407 miles par heure sur un mile, soit 1.001,667km/h et 630,388 miles par heure sur un kilomètre, soit 1.014,511km/h. La différence entre les deux s’expliquant par le fait que la voiture termine son kilomètre en « roue libre ». Avec ces deux moyennes, la Blue Flame repousse encore le record de vitesse un peu plus loin, et surtout, elle est la première voiture à homologuer un record au-delà des 1.000km/h !
La Blue Flame détiendra ce record durant 13 ans, puisque en 1983, la Thrust 2 lui ravit le titre pour quelques kilomètres par heures mais cette fois avec un moteur à réaction. La Blue Flame est ainsi la seule et dernière voiture a figurer au palmarès du record de vitesse terrestre…