Sœur jumelle de la Citroën Axel, la Oltcit Club est la variante roumaine de la petite Citroën, elle fut produite entre 1982 et 1996. Pourtant, derrière cette voiture roumaine, c’est bel et bien une voiture qui était destinée pour la France à l’origine, et qui a été tuée dans l’œuf par Peugeot lors du rachat de Citroën. Découvrons donc l’histoire de la Oltcit Club…
Sans refaire tout la genèse de cette voiture déjà évoquée pour la Citroën Axel, cette voiture naît en France à la fin des années 1960. Les bureaux d’études de Citroën commencent alors à étudier une voiture qui pourrait s’intercaler entre la 2CV et la DS sans pour autant reprendre la base de la 2CV déjà tant déclinée (Dyane, Méhari, Ami6 et 8 …). Cette étude donne naissance au prototype Y développé avec Fiat, suivit du Prototype TA suite au départ du constructeur italien de ce projet. Courant 1974, les études arrivent à leur phase finale et le projet est prêt à être industrialisé. Cependant, Peugeot prend le contrôle de Citroën et impose que Citroën reprenne la base de la Peugeot 104 pour concevoir ses futures voitures citadines. Le projet TA était mort dans l’œuf, son style sera toutefois recyclé sur la Citroën Visa apparue en 1978.
Mais pour Citroën, la Projet TA était arrivé à maturité et avait coûté de l’argent, dès lors, le constructeur aux chevrons tente de faire entrer des liquidités dans ses caisses en revendant clé en main le projet, ou en envisageant une commercialisation de ce modèle dans les pays de l’Est. Par un concours de circonstances, c’est finalement en Roumanie que le projet va vivre. En effet, la Roumanie dirigée par Ceausescu est à la recherche d’un second constructeur automobile après Dacia, dans le même temps, Peugeot place à la tête de Citroën Georges Taylor, natif de Roumanie. Le rapprochement entre Citroën et la Roumanie est donc facilité et donne naissance le 30 Décembre 1970 à un accord entre les deux acteurs.
Cet accord signé entre Nicolae Ceausescu et Citroën était ambitieux. Outre la création d’un nouveau constructeur (dont Citroën aura 36% du capital) qui prendra le nom d’Oltcit, contraction entre Olt (une rivière locale) et Citroën, le contrat prévoit la construction d’une usine dans la ville de Craiova avec à terme une production annuelle de 130.000 voitures. Si Ceausescu souhaite une voiture 100% roumaine, Citroën obtient cependant l’importation de pièces en Roumanie pour produire la future voiture, en contrepartie, Citroën devra racheter 50% de la production de l’usine pour l’exporter.
Quant à la voiture produite par Oltcit, Citroën se débarrasse de son Projet TA et le modifie pour faciliter sa production. Ainsi, de cinq portes à l’origine, la voiture de série n’aura que trois portes. Mais aussi, Citroën adapte la voiture pour les conditions de circulation locale, avec entre autres, un carburateur capable de subir les grands froids, et une garde au sol rehaussée pour tenir compte de l’état des routes roumaines.
Si l’accord est conclu à la fin de l’année 1976, la voiture de série ne fut présentée qu’en 1981 lors de la Foire de Bucarest qui s’est ouverte le 15 Octobre. Ce retard est causé par la construction de l’usine d’une part, mais surtout par la lenteur de l’administration roumaine d’alors, qui n’a eu de cesse de changer le lieu d’implantation de l’usine. La voiture se décline en deux versions, l’Oltcit Spécial à moteur bicylindre de 652cm3 développant 36Ch, et l’Oltcit Club avec un quatre cylindres à plat de 1.129cm3 d’une puissance de 56Ch. La voiture est commercialisée dans la foulée et les chaines de production de l’usine de Craiova sont mises en route.
Pour la première année de fabrication de la voiture, il ne sortira que 7.915 Oltcit au cours de l’année 1982, alors que le contrat initial prévoyait une production de 130.000 unités. La faute à un manque de formation des ouvriers fraichement recrutés. Rappelons que l’usine est implantée dans une zone rurale et que les ouvriers, une fois leur journée à l’usine terminée, allaient travailler dans leurs champs. Pire encore, l’usine de Craiova subit un problème d’approvisionnement, puisque la plupart des pièces sous traitées en Roumanie étaient de mauvaise qualité. Cette première année est donc loin des objectifs, ce n’est pas mieux en 1983 avec seulement 8.500 unités sorties d’usine.
Les choses s’améliorent en 1984, Citroën annonce l’exportation du véhicule en Europe de l’Ouest, cette année, c’est 20.200 exemplaires qui sortent d’usine. La production l’usine s’améliore sur le plan qualitatif mais jamais le chiffre des 130.000 unités ne sera atteint. Néanmoins, si la qualité s’améliore, le résultat final ne convainc toujours pas Citroën, pour qui l’Axel ne répond toujours pas aux standards de l’Europe de l’Ouest. Pourtant, apparaît alors le moteur 1,3 litres sur la Oltcit Club, ainsi que sur l’Axel. Si en Roumanie la voiture se vend bien, tel n’est pas le cas à l’export où Citroën est contraint de brader l’Axel. Pire encore, la fiabilité fait défaut et Citroën commence à lâcher prise, à commencer par le réseau de garagistes qui délaisse alors peu à peu cette voiture qui coûte cher en garantie, avant que Citroën commence à envisager d’abandonner la partie.
Mais l’élément qui marquera la rupture entre Citroën et Oltcit apparaît à partir de 1986. A partir de cette année, le constructeur roumain commence à avoir des difficultés à payer Citroën pour les pièces importées, qui sont pourtant nécessaires à la fabrication de la petite Oltcit. Et c’est alors qu’Oltcit se tourne vers Dacia, l’autre constructeur roumain, pour lui fournir des boites de vitesses et des systèmes de freinage, des éléments qui furent montés pour les véhicules destinés à la Roumanie, les éléments Citroën sont quant à eux réservés en priorité à l’Axel. Par ce petit manège, Oltcit pense berner Citroën, mais la supercherie est découverte en 1988, et fut sans aucun doute la goutte d’eau qui fit déborder le vase. L’alliance éclate cette année là, Citroën se retire d’Oltcit en revendant ses parts à l’Etat roumain et arrête l’exportation des Axel en 1990.
Avec l’arrêt de l’alliance, Oltcit, devenu par conséquent Oltena, tente de voler de ses propres ailes en présentant en 1989 une Club à quatre portes, mais qui n’aura pas de descendance commercialisée. Puis, en 1990, Oltcit arrête la commercialisation de la Spécial à moteur bicylindre. Il ne reste plus que la Club avec ses moteurs issus de la GS, et pour viser une clientèle plus large, les versions « utilitaire » et « pick-up » sont lancées sur le marché. La voiture perdure ainsi quelques années en Roumanie à une cadence située aux alentours de 12.000 exemplaires produits annuellement.
Enfin, en 1994, Oltcit est racheté par Daewoo, qui en profite pour remodeler le modèle à coup de grands pare-chocs en plastique et donner un nouveau nom à la marque : Rodae (pour ROmanian DAEwoo). Cette voiture fut éphémère, elle fut commercialisée à partir de 1995 pour disparaître l’année suivante, puisque à partir de 1996, l’usine de Craiova ne produit plus que des voitures Daewoo. Ainsi disparaît le constructeur Oltcit après 15 années d’existence.