Renault 15 TL – 1974

         Au début des années 1970, la catégorie des coupés est très prometteuse, et la concurrence y est rude entre les Ford Capri, Opel Manta, Alfa Romeo Coupé Bertone, tandis que certains constructeurs affutent leurs prochaines armes qui marqueront ces années, à l’instar de Volkswagen et son Scirocco ou encore Alfa Romeo avec le GTV. La Régie Renault semble prendre conscience que ce créneau automobile est porteur tant aussi bien sur le plan des ventes que sur le plan de l’image de marque, c’est ainsi qu’elle va présenter en 1971 non pas un, mais deux coupés : le duo Renault 15 et 17 .

           Si la R17 s’affirme comme la sportive de la gamme Renault, la R15 se positionne plus difficilement. Coupé oui, mais aux motorisations bien plus faibles côté chevaux que celles de la R17, et un look bien moins sportif, ce qui laisse présager d’une R17 au rabais. Mais dans les faits, tel n‘est absolument pas le cas, la R15 est une voiture à part entière, qui, bien qu’ayant une ligne très proche de la R17, elle s’en distingue sur bien des plans, et dispose de sa propre personnalité ! Cap sur la R15, avec ce modèle TL de 1974 mis à notre disposition !

 

               En présentant deux coupés en 1971, on pouvait se demander quelle mouche avait piqué Renault, car il me semble que c’est la première fois qu’un constructeur présente deux voitures très proches l’une de l’autre, pour ne pas dire quasi identiques. Mais c’est en regardant l’esprit de chacun de ces deux modèles que l’on voit le génie de la Régie,  non il ne s’agit pas d’une indécision des grands pontes de Renault entre un coupé vitré ou un coupé au look plus sportif, mais d’une solution qui permettra de ratisser très large au niveau de la clientèle, avec une R15 qui a pour but d’aller chercher les clients qui souhaiteraient avoir un coupé, mais qui ne peuvent se permettre cette folie, le tout sans dénaturer à l‘image sportive de la R17. Ainsi, à la R15 la tâche d’élargir la clientèle, à la R17 la vocation sportive.

               Ainsi, la Renault 15 ne devait en aucun cas se concevoir comme une R17 au rabais, et devait donc disposer de ses propres atouts. La Régie a surement dû analyser les raisons pour lesquelles les potentiels clients rêvant d’un coupé ne passaient pas à l’achat : souvent, les coupés n’ont que deux places réelles, et deux places arrière étant presque inutilisables, ce qui prive le coupé de la large clientèle des pères de famille. La Renault 15 y remédie en proposant quatre vraies places ! Souvent, les coupés, avec leur conduite sportive, se révèlent assez peu pratiques pour une utilisation au quotidien. Là encore, la Renault 15 se distingue avec des motorisations provenant de la R12, ce qui va lui conférer une conduite similaire à une berline. Enfin, très souvent, le prix fait un peu tiquer les acheteurs potentiels, c’est pourquoi la R15 va tenter de s’afficher à des prix contenus !

               Ainsi, on remarque que la Renault 15 est construite dans l’idée de faire une voiture mixte, qui dispose à la fois des charmes d’un coupé, tout en conservant les avantages d’une berline. Sur ce point, la R15 semble avoir réussi son pari, puisque en définitive la R15 n‘est qu‘une R12 en habits de sport ! Et le public, tout comme la presse, ont bien accueilli cette voiture. Preuve en est, c’est en tout 209.887 exemplaires qui furent écoulés au long de sa carrière, contre 94.969 exemplaires pour la R17. Le grand succès de la R15 s’explique par son prix plus bas par rapport à la R17, mais surtout par les crises pétrolières des années 1970, qui ont jeté le trouble sur les ventes des modèles sportifs : la R17 en a fait les frais, mais la R15 a su rattraper le coup !

               Avec son pare-chocs avant encadrant l’intégralité de la calandre, laquelle embarque deux phares de Renault12; et son pare-chocs arrière en polyester, ses lignes tendues et son intérieur dans l‘ère du temps, la Renault 15 affiche un look très seventies. Tout cela est souligné par le nuancier de teintes flashy proposées au client : jaune, orange, vert, bleu … Hélas, l‘acheteur de cette Renault 15 choisira une teinte moins originale avec ce marron métallisé, ou plus exactement, pour reprendre les termes du nuancer Renault, le « Beige Métal 113 ». Mais toutefois cette teinte se fait plutôt rare de nos jours, ce qui peut faire son attrait aujourd’hui !

              Sous ce plumage, le client avait le choix entre deux versions de la Renault 15, soit la TL, l’entrée de gamme avec un moteur de 60 cv, ou la TS, se voulant plus « sportive » avec ses 90 cv. Si la TS s’équipait d’un quatre cylindres en ligne de 1.565cm3 alimenté par un carburateur double corps qui permettait d’atteindre les 170km/h; la version TL que nous avons pour cet article s’équipe d’un quatre cylindres en ligne de 1.289cm3, issu de la Renault 12 TS, alimenté par un carburateur double corps et accolé à une boite à quatre rapports. Quant à la vitesse maximale, la 15 TL est donnée pour 153km/h, des performances guère meilleures que celles de la berline dont elle emprunte le moteur. Côté technique, le freinage de la Renault 15 est confié à des disques à l’avant et des  tambours pour les roues arrières, alors que la 17 disposait de quatre freins à disque.

               Ainsi, vous l’aurez donc compris, la R15 de cet article se situe tout en bas de la gamme des Renault 15. Cette position d’entrée de gamme se ressent une fois dans l’habitacle,  si l’ambiance sportive est présente grâce à une position de conduite basse, un volant au look sportif avec deux branches, et une rangée de compteurs se dressant face au conducteur; le reste tient plutôt du minimalisme. En effet, le tableau de bord demeure vide en dehors du monogramme « Renault 15 » devant le passager, tandis que l’absence de console centrale entre les pieds du conducteur et de son passager accentue cette sensation de vide.

                La R15 ne se contente que du minimum, preuve en est encore avec les fauteuils, qui certes sont larges et confortables, mais n’offrent pas d’appuie-tête, et pour un coupé, n’offrent pas du tout de maintient. Dommage car ce détail casse le peu d’ambiance sportive que Renault avait pu offrir à la 15. Et d’ailleurs, en jetant un coup d’œil attentif sur le volant « sport », celui-ci nous livre ses secrets : l’aspect des branches à trous, en imitation aluminium, n’est simplement dû qu’à un enjoliveur en plastique ! La finition reste très sommaire, elle est un peu juste pour un coupé et l’on ressent quelques relents de la production de très grande série. Mais si l’intérieur demeure simple, le confort est tout de même au rendez-vous, en dépit de maintient, la position de conduite demeure correcte, si bien que l’on pourrait presque oublier l’absence d’appuie-tête. Quant à la place, il y en a à revendre, aussi bien concernant les places avant que les places arrière. Partons désormais sur nos routes …

               Contact mis, je tourne la clé et le moteur démarre au quart de tour. Sans surprise, c’est l’habituel bruit du Cléon qui se fait entendre, voilà qui n’inspire pas forcément la sportivité. Mais voyons ce que ce 1300 a dans le ventre ! Au long de ce court essai, et dès le départ, cette R15 me surprend très positivement par sa conduite, très simple, qui me semble-t-il est calqué sur celle de la Renault 12. La direction est très précise, les vitesses se passent d’un coup de main, le moteur quant à lui marche magnifiquement bien et permet de s’insérer dans la circulation moderne sans aucune difficulté, ce qui permettrait de faire de la Renault 15 un « daily-driver » ! Et finalement, les fauteuils, bien que simples, confirment la sensation de confort déjà évoquée. Voilà quels sont les atouts de la Renault 15, mais au final, ce comportement de berline rompt avec le style qu’elle inspire, coupé oblige, on aimerait qu’elle soit sportive, mais ceci, la Renault 15 ne l’est pas, encore moins le modèle essayé, puisque celle-ci n’a qu’une boite à quatre vitesses ! Si cela n’est pas trop gênant, on sent qu’aux environs de 90km/h, la voiture aurait largement mérité un cinquième rapport, ne serait-ce que pour laisser reposer les oreilles des occupants, et occasionnellement soulager le moteur ! Et cette cinquième vitesse sera mon plus grand regret de cette voiture !

               Côté nervosité, le moteur est … sans plus, les 60 cv du 1300 sont présents, mais il semble manquer quelques petits chevaux pour donner à la 15 un caractère digne de ce nom, en accélération pure, le moteur arrive vite à ses limites, et semble un peu « lent » pour faire décoller la voiture, cela se ressent encore plus lors des dépassements, lorsque la nécessité d’avoir une accélération franche est la plus forte. Si côté vitesse maximale, Renault annonçait un 150km/h, cela me semble purement théorique, du moins avec une boite 4 ! Pour avoir poussé la belle jusqu’à la vitesse faramineuse de 110km/h, si le comportement routier est encore très bon à cette vitesse, le moteur lui ne semble pas partant pour aller plus loin… Alors remettons nous à 90km/h, une vitesse de croisière que tient sans problème aucun la Renault 15, et profitons ainsi de cette voiture et des paysages qui défilent, le temps d’aller rendre les clés…

             Voiture sportive, la Renault 15 ne l’est donc pas, mais elle se révèle avoir un très bon comportement routier. L’on ne peut que se rappeler, après cet essai, du slogan d’une publicité de la R15 : « entre la voiture dont on rêve et celle dont on a besoin, la Renault 15 réussit l’impossible équilibre ». Le département communication de la Régie disait donc juste, pour ce coupé ne cachant finalement ni plus ni moins qu’une berline bien pratique au quotidien. Mais cependant, nombre de clients auraient voulu plus de la Renault 15 côté performances, et heureusement pour eux, s’offrait la R15 TS pour quelques deniers de plus !

Les +
_ Fiabilité
_ Agréable à conduire
_ Ligne très seventies

Les –
_ Rares en bon état
_ Où est la cinquième ?
_ Finition

L’avis d’Alex

               Loin d’être une Renault 17 au rabais, la R15 est une voiture disposant de sa propre personnalité, à commencer par une ligne moins agressive au regard que celle de la R17, faisant peut-être plus ancienne par ses larges surfaces vitrées. Et bien que Renault ai voulu donner une petite ambiance sportive à la « Quinze » avec le volant sport ou la rangée de compteurs, la R15 ne doit surtout pas être prise pour une sportive, sans quoi l’on serait déçu du voyage. En effet, la R15 est plutôt une voiture de « ballade », une simple berline avec une carrosserie de coupé en somme. Certes, si en termes de placement, elle demeure de nos jours coincée entre la Renault 12 qui lui donne ses éléments mécaniques, et la sportive Renault 17, la R15 dispose de nombreux avantages, à commencer aujourd’hui par sa côte encore faible : comptez entre 2.000 et 4.000€ pour un beau modèle ! Cependant, en dépit du grand nombre de R15 fabriquées, leur rareté sur le marché de la collection est bel et bien présente, causée par divers maux : fabriquée dans les années 1970, décennie où les constructeurs économisaient sur la qualité du métal, la rouille est hélas un mal récurent sur la R15. S’en suivent les années 1980 et le tunning qui n’épargnera pas ce modèle et son image; et les années 1990 voient apparaître les primes à la casse à un moment où la R15 était complètement délaissée … Ainsi, trouver un exemplaire en bon état de conservation nécessitera un peu de patience si vous êtes acheteur !

          Mes remerciements à Ludo du « Relais de l’Auto Ancienne » pour la mise à disposition de cette Renault 15; sans oublier non plus J-F pour sa relecture !

10 réflexions sur « Renault 15 TL – 1974 »

  1. Je garde un excellent souvenir de ma R15 TL, un modèle de 1973 marron métallisé (peut-être « beige métal » ?), achetée d’occasion âgée de plus de 10 ans et 70000km : belle, confortable, économique, …et nerveuse comparée à ce que j’avais conduit auparavant (Citroën GS, Peugeot 204, FIAT 128). Sans aucune modification de ma part, elle se montrait aussi agréable à conduire sur les petites routes ardéchoises que pendants longs trajets autoroutiers. Elle soutenait facilement (mais assez bruyamment, c’est vrai) un 130-140 de croisière pendant des heures où même mes 2 passagers arrière se régalaient. La seule amélioration apportée : une console centrale « maison » pour y loger l’autoradio à cassettes et ampli et les 4 hauts-parleurs aux 4 coins de l’habitacle.

    Je ne l’ai quittée qu’à regrets pour pouvoir échapper aux embouteillages en circulant à moto.

  2. J’ai eu une R15TL pendant quelques années et je dois reconnaître que je n’ai jamais su ou se trouvait le starter, qui n’était pas automatique sur cette voiture, tant la belle démarrait au quart de tour et par tous les temps. Le gros inconvénient c’était la rouille qui se formait sur le dessus des ailes. Je l’aurais encore gardée un moment si un taré n’était pas venu me l’emboutir par l’arrière me poussant sur le véhicule qui me précédait.
    Nonobstant le manque de nervosité de ce coupé, il ne fallait pas avoir le pied trop lourd sur l’accélérateur car la tenue de route était assez hasardeuse.

  3. Le 1289  » cléon  » de 60 CV est équipé d’un carbu double corps ; pour passer au dessus de 110 km/h il faut forcer un peu sur la pédale d’accélérateur pour ouvrir le second corps et là ça se passe beaucoup mieux …… En consommant plus et avec plus de bruit .. Manque effectivement une cinquième ! Par contre sur nationales en quatrieme à 80 – 90 km/h si vous voulez dépasser ouvrez en grand les deux corps et vous allez en surprendre

        1. Ma première voiture une 15TL jaune que du bonheur. Un connard me l’a emboutie.je l’ai remplacée par une 15TL blanche. Vraiment de très bons souvenirs

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