Giotto Bizzarrini

               Un ingénieur de légende. Derrière Giotto Bizzarrini, on compte parmi les plus merveilleuses voitures sportives de la seconde moitié du XXème siècle et une marque automobile à son nom. bref, un grand Monsieur de l’histoire automobile qui a fait ses preuves chez Ferrari et qui fut un homme clé de Lamborghini… Retour sur son œuvre.

Bizzarrini avant l’automobile

                   C’est le 6 juin 1926 que Giotto Bizzarrini voit le jour dans le village de Quercianella, près de Livourne. Issu d’une riche famille de Toscane, son père était ingénieur à la tête de son entreprise et sa mère issue de la famille du poète Tasso. Après la Seconde Guerre Mondiale, il entreprend des études d’ingénieur à l’Université de Pise dont il sort diplômé en juillet 1953. Passionné par la chose automobile, il entreprend la construction d’une voiture de son cru sur la base d’une Fiat Topolino. 

Bizzarrini chez Alfa Romeo (1954-1957)

                En 1954, Giotto Bizzarrini entre chez Alfa Romeo, certainement aidé par les contacts de son grand-père qui fut en contact avec de nombreux ingénieurs du constructeurs dont l’un d’eux était devenu directeur du personnel. Il est affecté au développement du châssis de la Giulietta. Un travail qu’il effectue au sein du « Servizio Esperimenze Principali » (en clair : le bureau d’études) du constructeur, il devient à l’occasion pilote d’essai. Aspirant à devenir motoriste, notamment pour la compétition, il quitte rapidement Alfa Romeo pour partir chez Ferrari pour y remplacer l’ingénieur essayeur Sergio Sighinolfi, victime d’un grave accident. 

Bizzarrini chez Ferrari (1957-1961)

                  En 1957, Giotto passe donc à Maranello, un recrutement fait par Enzo Ferrari qui connaissait la réputation de Bizzarrini sur la mise au point des châssis. Il arrive chez Ferrari en février 1957 et œuvre sur la 250 GT. Du poste d’ingénieur essayeur, il prend la direction du contrôle des voitures de série dès 1958. Il participe en outre aux développements des Ferrari Testa Rossa engagées en compétition.,à la mise au point de la 250 SWB puis commence à œuvrer sur la future 250 GTO.  Il participe également à l’étude de la Ferrarina qui, désapprouvé par Enzo Ferrari, devient l’ASA. Aux débuts des années 1960, il est l’ingénieur en Chef de Ferrari, un poste qu’il ne conserve que quelques mois. En octobre 1961, une partie des cadres de Ferrari fait sécession, Giotti Bizzarrini en fait partie avec, entre autres, Carlo Chitti, directeur Technique de la Scuderia et Romolo Tavoni, directeur sportif. 

ASA : Bizzarrini œuvre sur le châssis

L’ASA : Le projet de la Ferrarina émerge à la fin des années 1950, l’objectif est de produire une voiture accessible et offrir du volume aux usines Ferrari, avec l’espoir d’apporter du cash à Ferrari pour alimenter la Scuderia Ferrari. Abandonné par Enzo Ferrari, le projet est recyclé par le constructeur ASA… [En savoir plus…]

Ferrari 250 GTO

Giotto Bizzarrini posa les bases techniques de la Ferrari 250 GTO. Il ne verra pas cette création au sein de Ferrari, quittant le constructeur au cheval cabré quelques semaines avant sa présentation. 

Bizzarrini chez ATS (1961-1963)

                 En partant de chez Ferrari, Bizzarrini se rallie à Carlo Chitti et Romolo Tavoni pour s’engager dans l’aventure ATS (Automobili Turismo e Sport). Ce nouveau constructeur est financé par le Comte Volpi, un entrepreneur vénitien déjà à la tête de la Scuderia Serenissima. Chez ATS, Bizzarrini œuvre sur des projets qui doivent mener à terme à un engagement en Formule 1. Entre temps, Volpi demande à Bizzarrini de créer une Grand Tourisme pour concurrencer la future 250 GTO. En fait, seules deux voitures naitront, l’ATS 2500 GT dont la robe est l’œuvre de Franco Scaglione mais qui ne fut fabriqué qu’à une petite poignée d’exemplaires. Quant à la Formule 1, l’ATS 100 ne va pas connaître la réussite. Bref, avec des moyens limités, Bizzarrini décide de voler de ses propres ailes dès 1963. ATS disparait en 1964… 

               C’est à l’époque où il officie chez ATS que Bizzarrini créé la Ferrari 250 GT Breadvan. Une histoire des plus passionnantes qui commence par le refus de vente par Enzo Ferrari de deux 250 GTO au comte Volpi. Piqué, il missionne Bizzarrini de lui concevoir une voiture équivalente sur la base d’une Ferrari 250 GT SWB pour aller l’affronter en terres mancelles. 

Bizzarrini fonde Autostar, partenaire de Lamborghini et Iso Rivolta

                 En fondant Autostar, Giotti Bizzarrini a les mains libres et son objectif premier est atteint : devenir motoriste. Démarché par Ferruccio Lamborghini qui, s’étant fâché avec Enzo Ferrari, décide de produire ses propres sportives, le constructeur de tracteurs agricoles est à la recherche d’un ingénieur motoriste. Bizzarrini est le mieux placé, il conçoit un V12 de 3,5 litres pour 370Ch pour Lamborghini, lequel fut revu par l’équipe de Dallara pour le fiabiliser (et ramener la puissance à 280Ch). On trouve ce moteur sur les premières Lamborghini de série, et Lamborghini s’en sert comme base pour développer moult modèles que l’on trouvera des années plus tard dans sa gamme, parmi lesquels la Miura, puis la Countach.  

           Bizzarrini mène d’autres projets, sans doute aidé par la notoriété des premiers contrats. Renzo Rivolta le contacte pour sa nouvelle marque, Iso Rivolta. Cette fois, ce n’est pas sur le moteur que Bizzarrini œuvre mais sur le châssis. C’est ainsi qu’il œuvra pour donner naissance à l’Iso Rivolta IR 300, puis Bizzarrini poussa pour en dériver un coupé qui pourrait être engagé en compétition : la Grifo A3C. La Grifo est disponible en version compétition ou en version Stradale pour rouler sur la route. L’aventure entre les deux hommes tourne court, les dissensions naissent entre un Renzo Rivolta qui veut vendre des voitures Grand Tourisme et Giotto Bizzarrini qui veut développer des voitures de compétition. Quand la Iso Griffo nait en 1965, Bizzarrini présente une voiture sous sa propre marque, étroitement dérivé de la version de course de l’Iso Griffo. 

Bizzarrini constructeur (1965-1968)

             En 1965, Bizzarrini est désormais constructeur d’automobiles, il commence son activité avec la 5300 GT, elle est étroitement dérivée de l’Iso Griffo A3C. En fait, c’est une décision de justice qui décide que Bizzarrini peut récupérer la base de la Griffo A3C (fournie par Iso Rivolta) pour développer ses propres voitures, tandis que Iso Rivolta peut continuer à utiliser le nom Grifo déposé par Bizzarrini. La Bizzarrini 5300 GT est équipée d’un moteur Chevrolet de 327ci d’une puissance de 365 ch. De cette voiture, Bizzarrini en développe des version de compétition à plus de 400Ch mais le palmarès fut peu fourni avec une victoire de classe aux 24 Heures du Mans 1965.

               Si la Bizzarrini 5300 GT se vend, ce n’est pas suffisant pour faire tourner l’entreprise. En 1967, Bizzarrini descend en gamme avec l’Europa, une voiture d’inspirant de la 5300 GT mais aux dimensions réduites, et équipée d’un moteur d’origine Opel pour 110Ch. La voiture est pleine de promesse, Bizzarrini engrange des commandes. Mais les problèmes d’approvisionnement que connaissait le constructeur italien sur la 5300 GT continuent sur l’Europa. Pire, Bizzarrini n’arrive pas à trouver un carrossier qui soit fiable sur d’importants volumes de production. Au final, il n’y eu que douze Europa produite…

                 Entre temps, la barquette P538 destinée à la compétition et lancée en 1966 ne connait aucun résultats. Pire, le changement de règlementation en 1967 condamne la voiture, dans laquelle Bizzarrini avait injecté par mal de liquidités. En 1968, l’un des châssis est habillé par ItalDesign pour donner naissance à la Manta. Trop tard, la marque n’a plus de liquidité, elle est fermée en septembre 1968. Des nouveaux actionnaires ont tenté de la faire revivre en injectant de l’argent en février 1969, mais c’est en excluant Giotto Bizzarrini. 

Les derniers projets de Bizzarrini

                 Après avoir été évincé de son entreprise, Bizzarrini devient consultant pour le compte de l’américain AMC. Un heureux concours de circonstances : en 1969, AMC veut décliner son coupé AMX qui connait un certain succès en un coupé à moteur central arrière capable de rivaliser avec les sportives italiennes. Bizzarrini est libre, on fait appel à ses compétences de motoriste et sur les châssis pour le développement du concept AMX/2. Très favorablement accueilli par le public, AMC lance l’étude d’une commercialisation avec le projet AMX/3, dont le développement est en grande partie confié à Bizzarrini. Mais tout s’arrête à l’été 1970 par l’annulation du programme par AMC. Bizzarrini tenta bien de sauver le programme en le produisant lui-même, mais AMC refusa de lui fournir les équipements pour la produire.

                Giotto Bizzarrini se retire en suite du monde automobile pour reprendre un poste de professeur aux universités de Florence et de Pise. Il revient ponctuellement à l’automobile en qualité de simple consultant, notamment sur un projet de Formule 3 à effet de sol. En 1989, par suite d’une rencontre avec un riche américain, il développa la Bizzarrini BZ 2001 basée sur une Testarossa, présentée en 1993 avec un business-plan portant sur une vingtaines d’exemplaires vendus par an. Un projet sans lendemain. En 1998, Bizzarrini présente le prototype Kjara, puis d’autres projets sans qu’il n’y ait de concrétisation… 

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