Depuis sa séparation avec Fiat à l’aube des années 1980, Seat survit avec des voitures héritées de l’époque Fiat et s’attaque désormais au marché européen. Toutefois, pour éviter le procès en contrefaçon, Seat est obligé d’adapter ses produits… Ainsi naît, entre autre, la Seat Ronda qui n’est qu’une Ritmo à la sauce espagnole. Mais Fiat ne resta pas loin derrière…
A la fin des années 1979, si la coopération entre Fiat et Seat a déjà du plomb dans l’aile, le grand public n’en sait encore rien, preuve en est de la présentation quasi simultané de la Ritmo du côté des deux constructeurs. Mais en coulisses, les relations entre les deux entreprises se dégradent fortement. Pour rappel, Seat est né dans les années 1950 pour doter l’Espagne, alors franquiste, d’une industrie automobile, Fiat en devient le partenaire en prenant une participation au capital et en octroyant à la firme espagnole son savoir-faire et les licences de ses modèles. Au décès de Franco en 1975, la République espagnole souhaite se séparer de cette entité automobile quand Fiat souhaite devenir l’actionnaire majoritaire.
Mais dans le monde des affaires, certaines choses d’apparence simples peuvent devenir compliquées. L’Etat espagnol souhaite que Fiat prenne des engagements de maintien d’emplois et d’activité sur le territoire espagnol ; tandis que Fiat effectue des audits du constructeur hispanique. Entreprise surendettée, mal gérée et en sureffectif, le tableau apparait sombre pour Fiat qui maintien son offre mais impose ses conditions : plan de réduction du personnel, liberté de fixation des prix et obtention de prêts cautionnés par l’Etat espagnol.
En 1979, les choses pressent, l’accord initial entre Fiat et Seat, d’une durée de trente ans, arrivera à son terme en 1980… et rien n’a évolué entre les deux protagonistes. Un compromis est trouvé et passe en premier lieu par une augmentation de capital à laquelle Fiat participe. Mais ensuite, Fiat doit régler ses problèmes en interne (grève, qualité des produits) tandis que la situation financière de Seat ne s’améliore pas; juin 1980 passe sans que Fiat et Seat ne trouvent un accord. Finalement, c’est Fiat qui lâche l’aventure en mai 1981 en revendant sa participation dans Seat pour 1 pesetas symbolique…
Le divorce étant acté, Fiat et Seat trouvent un dernier accord de coopération par lequel le constructeur italien autorise son ancien partenaire à continuer la production des modèles Fiat, sous la condition que les Seat aient un quart de pièces spécifiques pour éviter toute confusion auprès du public. La Seat 127 devient alors Seat Fura (lire aussi : Seat Fura), la Panda (lire aussi : Seat Panda) conserve cette dénomination quelques années avant d’être rebadgée en Marbella, et la Seat Ritmo devient Ronda courant 1982. Cette dernière apparaît avec une face avant corrigée, un capot, des optiques et boucliers spécifiques au modèle, sans oublier l’intérieur revisité.
Mais cette Seat Ronda n’est pas du goût des italiens qui la trouvent encore trop proche de leur Ritmo, des négociations entre les deux anciens partenaires s’effectuent sans aboutir à un accord. La rancœur de la séparation est sans doute tenace de chaque côté… En novembre 1982, Fiat décide donc d’attaquer Seat en justice devant Cour Internationale d’Arbitrage sise à Paris, pour non respect de leur contrat, Seat fait alors produire une Ronda noire dont les pièces spécifiques sont repeintes en jaune. Pour les juges parisiens, le compte est bon, la Ronda dispose bien du minimum de pièces spécifiques tel que stipulé dans l’accord de 1981. Seat peut donc continuer à commercialiser sa Ronda, notamment hors des frontières espagnoles.
Comme les ennuis ne viennent jamais seuls, le constructeur Honda prend attache avec Seat pour faire part de son mécontentement sur le choix du nom Ronda, lequel peut, dans certaines langues, être confondu avec la marque nippone. L’affaire est prise au sérieux par l’Etat espagnol puisque Honda menace de réduire ses investissements pour la production de motos dans ce pays. Pour régler ce litige, Seat est obligé de s’astreindre à des quotas d’exportation avec le Royaume-Uni et l’Allemagne.
De 1982 à 1984, la Seat Ronda est produite avec les anciens moteurs Fiat 1.197cm3 et 1.438cm3 à culbuteurs, mais aussi avec les 1.592 et 1.995cm3 à arbre à cames en tête développés pour la Ritmo. Côté finitions, les versions L et CL (L et GL à l’export) se partagent l’entrée de gamme, une CLX (GLX et SX à l’export) vient chapeauter la gamme niveau confort avec, entre autres, économètre, volant réglable, vitres électriques et fermeture centralisée… Enfin, une version Crono complète l’offre et vise une clientèle en recherche de performances. Pour la petite histoire, la cinq millionième Seat sort d’usine en 1983 et fut une Ronda.
En 1984, grâce au résultat de l’arbitrage, mais aussi avec la recapitalisation de la société par l’Etat Italien, Seat vit des heures plus heureuses. un nouveau modèle développé avec Giugiaro et Porsche est sur le point de voir le jour. En attendant, la collaboration avec les allemands s’effectue aussi sur la Ronda qui dispose désormais de motorisations spécifiques en lieu et place des Fiat, les moteurs « Sygma » développés avec l’aide de Porsche. 1.200cm3 de 63Ch et 1.500 cm3 de 85cm3 sont au catalogue, seul le Diesel Fiat de 1,7 litre fait de la résistance. Cette Ronda 1984 s’offre également quelques améliorations difficilement perceptibles à l’œil nu : le hayon est revu pour intégrer une nouvelle lunette arrière, le châssis est renforcé, les ancrages de suspensions sont modifiées et renforcées et l’intérieur est entièrement revu et porté vers le confort.
Mais ces quelques efforts n’y feront rien, la Seat Ronda n’arrive pas à séduire la clientèle, aussi bien en Espagne qu’en Europe. Commercialisée, en France, Allemagne et Benelux, la Ronda reste dans le bas des tableaux de vente. En 1985, une version berline est développée sur la base de la Ronda pour donner naissance à la Malaga (lire aussi : Seat Malaga) censé plaire davantage au public espagnol. En 1986, quand l’heure de la retraite sonne, seules 177.738 Ronda on trouvé un preneur. Entre temps, Seat était passé sous le giron de Volkswagen et allait devenir un constructeur ayant les jeunes comme clientèle cible, aidé par l’Ibiza première du nom…