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Alfa Romeo Arna (1983-1987)

  

              L’Alfa Romeo est un témoin d’une période difficile chez Alfa Romeo, lorsque l’entreprise italienne était encore sous le giron de l’IRI, une entreprise industrielle nationalisée. Et le monde de l’automobile va connaitre dans les années 1970 une petite révolution, Volkswagen lance la Golf, qui rencontre un immense succès. La plupart des autres constructeurs sont pris par surprise, ceux qui développaient un projet similaire ont pu réagir rapidement pour contrer cette offensive, quant aux autres, ils devaient se laisser faire avec plus ou moins de mal. 

  

            Face à l’insolent succès de la Volkswagen Golf, Alfa Romeo va chercher à riposter dès la fin des années 1970. Cependant, les finances du constructeur italien ne sont pas au beau fixe et ne permettent pas de lancer une nouvelle étude, d’autant plus qu’un projet de remplacement de l’Alfasud était déjà dans les cartons, mais celui-ci était trop peu avancé pour envisager une commercialisation dans l’immédiat. D’un autre côté, l’Alfasud se vend encore bien, mais la concurrence que lui fait la Fiat Ritmo dès 1978, et la Golf, ne permettent pas d’utiliser la nouvelle usine de Pomigliano d’Arco à pleine capacité.

        Par conséquent, Alfa Romeo part à la recherche d’un partenaire, et c’est avec Nissan que des pourparlers vont naitre. Le choix d’un constructeur japonais est judicieux, d’une part, Alfa Romeo gagnerait en qualité de fabrication et en fiabilité, quant à Nissan, un tel accord lui permettrait d’entrer en Italie par la petite porte, permettant de contourner taxes et quotas qui limitent les importations de voitures japonaises en ce temps.

          Mais les négociations sont longues et laborieuses. L’IRI, organisme d’Etat propriétaire d’Alfa Romeo, a pour mission de sauvegarder les intérêts industriels italiens, et l’entrée d’un constructeur japonais en Italie fait peur. Par conséquent, les deux entités font des concessions réciproques, le tout pour déboucher sur un accord de coopération signé le 9 octobre 1980 à Tokyo entre les dirigeants d’Alfa Romeo et de Nissan.

          Naît ainsi la coentreprise Alfa-Romeo Nissan Automobili SpA (dont l‘acronyme est … ARNA). L’accord prévoit qu’Alfa Romeo produira la Nissan Pulsar sous sa propre dénomination, avec un moteur d’Alfasud, afin de devenir Alfa Romeo Arna. Pour se faire, est prévu l’envoi d’éléments de carrosserie par Nissan depuis le Japon pour que la voiture soit assemblée en Italie. Cependant, la politique italienne mettra son nez dans l’affaire, et quelques membres au pouvoir imposent d’Alfa Romeo la construction d’une nouvelle usine à Pratola Serra, située non loin de celle de Pomigliano, afin de créer 1.500 emplois; sans quoi le contrat de coopération serait dénoncé. Alfa Romeo est contraint de lancer la construction de cette nouvelle usine, transformant le contrat en une aberration économique.

              En effet, les pièces de Nissan une fois arrivées en Italie, sont assemblées dans l’usine de Pratola Serra afin de donner corps à la caisse l’Arna , lesquelles sont ensuite envoyées à l’usine Pomigliano pour y recevoir peinture, l’habitacle et la greffe mécanique.

  

                Outre le processus de montage de la voiture complexe, sans doute le contrat de coopération a été signé dans la précipitation. En effet, Alfa Romeo pensait pouvoir intégrer le moteur de l’Alfasud dans la Nissan Pulsar sans trop de modification. Mais dès la réception par les équipes d’ingénieurs du constructeur italien des premières Nissan Pulsar, les premiers problèmes apparaissent : pour intégrer la mécanique de l’Alfasud et son train avant, le compartiment moteur de la Nissan devra être revu. Et déjà, il faut préparer de nouveaux emboutis de presse, de nouvelles étapes dans le montage de la voiture, ce qui amène des surcouts de développement, mais aussi du retard dans le développement de la voiture. L’Alfa Romeo Arna sortira en 1983, avec trois ans de retard par rapport au calendrier initial …

                Plus encore, dans ce laps de temps, le cour du Yen s’envole, réduisant encore plus les marges de manœuvres d’Alfa Romeo pour rendre l’opération rentable, nécessitant d’augmenter le prix de revente initialement prévu. Et pour complexifier le tout, l’Arna ne pouvait pas être commercialisée dans les pays où Nissan était implanté …

  

                 Lors de sa présentation au salon de Francfort 1983, si les formes anguleuses de la voiture, son hayon arrière étaient encore dans les normes de l’époque, la ligne de la voiture avait déjà 5 ans, Nissan proposait déjà, sous le nom de Datsun, la Cherry en Europe depuis 1978. Et pour la petite histoire, Datsun était entre temps passé à une nouvelle génération de la Cherry. L’Arna présentait une ligne démodée, aux antipodes de ses autres produits, la voiture fut de suite rejetée par les « Alfistes » malgré l’intégration du Boxer de l’Alfasud, et le reste de la clientèle ne s’y trompe pas, sous son badge italien, l’Arna ne peut cacher ses origines japonaises. Serait-ce une tentative désespérée pour sauver la marque ? Le bide commercial n’était que prévisible …

                Pourtant, le moteur apportait sa personnalité à la voiture, la carrosserie recevait un traitement anticorrosion (zincrometal), à une époque ou les italiennes étaient tant décriées sur la qualité du métal utilisé. Et pour donner ses chances à l’Arna, Alfa Romeo avait développée tout une gamme, avec la L (3 portes) et la LS (5 portes) qui était équipée de base avec le boxer 1.2 de 63Cv, complété par la version TI en 1984 et son boxer 1.3 de 86Cv.

              Et l’équipement était complet, volant réglable en hauteur, essuie-glace arrière, lunette dégivrante, allume-cigare, et même une climatisation, le tout de série. Seules deux options étaient disponibles, le toit ouvrant et la peinture métallisée.

  

             Mais le mal était déjà fait, la voiture arrivait trop tard sur le marché, et la remplaçante de l’Alfasud, l’Alfa Romeo 33, venait elle aussi d’être présentée. Difficile d’exister avec une concurrente interne bien plus séduisante, performante, et ne cachant pas une voiture rebadgée. Le fiasco est total pour les dirigeants d’Alfa Romeo, entre surcoûts de développement, une voiture ne plaisant pas, les bénéfices étaient hors de portée. Pire encore, ce projet qui devait aider Alfa Romeo a « survivre » en attendant la 33 ne fera qu’enfoncer encore plus la situation du constructeur italien, si bien qu’en 1986, Fiat rachète son petit concurrent pour tenter de le maintenir en vie. Et l’une des premières décision après ce rachat fut de stopper l’Arna en 1987, après seulement 53.047 exemplaires.