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La page du Renault FT

Le Renault FT (appelé aussi FT-17) est le plus réussi de tous les chars mis en service pendant la Première Guerre Mondiale. De conception révolutionnaire avec sa tourelle pivotante à 360°, son moteur situé à l’arrière et ses chenilles débordantes à l’avant, le char Renault FT est équipé d’un canon de 37 mm ou d’une mitrailleuse Hotchkiss de 8 mm. Grâce à cette architecture, et aidé par une queue de franchissement, le Renault FT franchissait aisément les tranchées et obstacles du champ de bataille. Fer de lance des offensives de l’année 1918, il est l’un des artisans de l’Armistice…

Production : 3.583 exemplaires

Le temps des premiers chars

Les premiers « cuirassés terrestres » sont des réalisations anglaises puis françaises qui apparaissent sur le champ de bataille courant 1916/1917. En France, c’est le général Estienne qui est à la manœuvre, et en dépit d’une position peu favorable de l’Etat-Major, la programme  des cuirassés terrestre voit le jour à partir de la fin 1915/début 1916. Renault trop accaparé dans la production de munitions et de divers matériels roulants décline la proposition de le produire. C’est vers les entreprises Schneider et Saint-Chamond que le Général Estienne se dirige, le début d’une émulation entre les deux firmes qui va retarder le projet du char français. Les premiers éléments furent engagés en avril 1917, de manière fort peu optimale, révélant les défauts des premiers chars : faible rayon d’action, mobilité faible sur le champ de bataille, consommation élevée… en bref : trop lourd, trop gros. 

La génèse du Renault FT

        En parallèle, Louis Renault n’avait pas abandonné l’idée de produire un char. Déjà, il avait acquit quelques tracteurs Holt pour en copier le mécanisme des chenilles et produire, plus tard, un porteur d’artillerie, le Type FB (qui fut produit début 1917 au détriment du Type FT). En juillet 1916, Louis Renault présente onze études de char, dont celle d’un char léger qui retient l’attention du Général Estienne. Les grandes lignes sont déjà là : 4 tonnes maximum, hauteur de 1,75 mètres, une tourelle à tour complet embarquant une mitrailleuse, un moteur de 40Ch et deux membres d’équipage. Avec l’aval de l’Etat-Major, un prototype est commandé le 12 décembre 1916… Quand l’armée française passait commande pour 1.000 chars Saint-Chamond et Schneider. Le 30 décembre de la même année, Louis Renault défend son projet auprès de l’armée française qui l’oppose à Mourret, portant le projet d’un char lourds de 30 tonnes. Louis Renault l’emporte grâce à son pragmatisme : le Renault FT est motorisé par un moteur issue de la grande série, rapidement disponible, alors que le projet Mourret n’a pas de moteur existant capable de le mouvoir. L’appui du Général Estienne fut primordial pour obtenir cette décision.

             Au début de l’année 1917, le prototype du Renault FT subit de multiples tests qui permettent d’améliorer le projet, dans une certaine tension avec une partie du Comité chargé de l’évaluation s’opposant au concept. En mars 1917, 150 Renault FT sont commandés à des fins d’évaluation. En avril 1917, la débâcle subie par les chars lourds Schneider et Saint-Chamond (81 détruits sur les 121 chars engagés) tend à valider le char léger, une commande de 1.000 chars Renault FT est validé en mai 1917.  En juin, l’Etat-Major définit la stratégie d’emploi des chars et répartie les missions entre chars lourds et chars légers. Puis à l’été 1917, les autorités militaires décident que l’effort d’armement doit porter uniquement sur le char léger avec, en prévision, une commande de 3.500 exemplaires. Renault ne pouvant produire la quantité demandée en peu de temps, l’Etat impose une entente entre divers industriels pour répartir la production, quatre sont retenus : Renault, Berliet, Somua et Delaunay-Belleville. 

                 La production démarre chez Renault en décembre 1917, au printemps 1918 chez les autres acteurs. La production démarre lentement, en mai 1918, si Renault a produit 453 chars FT, seuls 17 sont aptes au combat. Les autres industriels chargés de l’assemblage commencent tout juste leur production, le retard est tel qu’il inquiète en haut lieu. Renault doit encore céder des tranches de production aux autres industriels, tandis que la licence du char FT est cédée aux américains pour lancer une production locale. Dans les faits, la production des chenilles à chaines en série a nécessité de réorganiser une partie des ateliers de Renault pour faire naitre des chaines de montage primitives : les Renault FT sont assemblées sur des tréteaux à roulettes poussés manuellement dans l’atelier de montage. Opérationnel à partir de juin 1918, ce procédé de production permet de combler le retard pris depuis le début de l’année. 

Le Renault FT entre dans la Guerre

Le 31 mai 1918, le Renault FT connait son baptême du feu à Chaudun, trente chars sont lancés dans une opération ayant pour but de retarder une offensive allemande dirigée contre Paris. Lancés sans préparation ni infanterie à leurs côtés, le combat est perdu par les soldats français mais le char FT vient de démontrer ses capacités à manœuvrer. Dès le lendemain, une contre-offensive française menée à l’aide de chars Renault FT, les combats sont violents avec des pertes élevées, mais les  allemands commence à se replier. Fin juillet, l’armée française emploie 185 Schneider, 190 Saint-Chamond et 585 Renault FT. Lors de chaque combat, l’emploi du Renault FT est décisif. Une partie des chars Renault FT produit en France sont confié à l’US Army, Patton organisa la première brigade américaine de chars d’assaut. 

                 Entre le 31 mai 1918 et le 11 novembre de la même année, le Renault FT est engagée dans 3.292 combats, 440 sont détruits pendant cette période. Au 8 novembre, 3.246 Renault FT avaient été livrés à l’armée française, dans le détail : 1.963 par Renault, 759 par Berliet, 314 par Somua et 210 par Delaunay-Belleville. On note aussi qu’au 11 novembre 1918, aucun des Renault FT produit sous licence aux Etats-Unis n’a eu le temps de fouler le sol européen. Cité à l’ordre de l’Armée par le Général Pétain dès le 30 juillet 1918, le Renault FT entre à la postérité. Lors du défilé du 14 juillet 1919, ce sont neuf Renault FT qui clôturent le défilé de la Victoire. 

Le Renault FT après la Guerre

A l’issue du Premier Conflit Mondial, la réputation du Renault FT n’était plus à faire. Rapidement, un quinzaine d’armée s’en équipe (jusqu’en Chine, le Japon, ou encore l’Afghanistan…), le char Renault participe à d’autres conflits. Dès 1919, il est engagé par la Pologne contre l’Armée Rouge qui, après avoir capturé quelques exemplaires, le copia. Les Etats-Unis, qui avaient acheté la licence, produisent le M1917 Light Tank dont environ 950 exemplaires ont été produits avant l’Armistice et dont les deux premiers exemplaires posent leur chenille en Europe le 20 novembre 1918. Il s’agit du point de départ de la production des chars par les Etats-Unis.  

En France, la question du renouvellement du Renault FT se posa dès 1923, et débouche sur l’emploi d’une multitude de chars par l’Armée française, dont Renault resta un important fournisseur. Comme successeurs du FT, il y eu  le Renault D1 (cher léger) à partir de 1926 ainsi que le Renault D2 (char moyen) employé à partir de 1932, puis le char Renault R35 (1936) qui est une synthèse des différentes pistes prises depuis lors. En mai 1940, l’armée française comptait encore 630 Renault FT dans ses rangs, un char obsolète face aux allemands qui, après les avoir capturer, les utiliseront dans des opérations de police, notamment lors de l’occupation de Paris. 

La dénomination exacte : Renault FT, et non FT-17.

La dénomination FT s’inscrit dans la logique des dénominations de Renault : le Type FT succède au type FS (un châssis porte-charge) et précède le type FU, un camion. Il ne faut donc pas chercher de sens aux lettres FT, bien qu’on peut lire ici et là que ces lettres signifient Faible Tonnage ou Franchissement de Tranchées. Quant à la dénomination FT-17, elle est issue de la pratique et nait postérieurement à la Première Guerre Mondiale. 

Quelques chiffres

Longueur : 4,10m 
Largeur : 1,74m
Hauteur : 2,34m
Poids : 6,5 t (mitrailleuse)
               6,7 t (canon)
Moteur : Renault 4 cylindres
Cylindrée : 4.535cm3
Puissance : 38Ch
Vitesse maxi : 7,8km/h ; 3km/h en combat

Sources : 
– Renault Histoire, avril 2017. Pages 7 et suivantes.
– Renault Histoire, octobre 2018. Pages 66 et suivantes.