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L’épopée d’Amédée Gordini

La jeunesse d’Amédée Gordini (1899-1921)

                C’est le 23 juin 1899 que naît Amedeo Gordini, dans la ville de Bazzano, entre Modène et Bologne. Issu d’une famille d’agriculteurs de condition modeste, rien ne le prédestinait à l’automobile. D’autant que le décès de son père alors qu’il n’avait que trois ans met la famille Gordini en difficultés. Sa mère aurait souhaité qu’il travaille à la Compagnie du gaz, un métier qualifié de sûr à cette époque. Mais Amedeo Gordini se passionne pour la chose automobile depuis qu’il a vu passer le Tour d’Emilie en 1907, alors à ses dix ans, il entre en apprentissage chez un forgeron pour apprendre le maniement du métal, puis à ses onze ans, il entre chez le représentant Fiat de Bologne. 

           Là, il apprend les rudiments de la mécanique auprès d’artisans pourtant peu enclins à partager leur savoir-faire. Mais la passion du jeune Gordini les surprend. C’est également à cette époque qu’il se lie d’amitié avec Eduardo Weber,  qui créa quelques années plus tard sa société de carburateurs. En 1914, Gordini quitte le garage Fiat pour aller chez le constructeur Isotta Fraschini en qualité de mécanicien. Il y travaille sous les ordres du chef d’atelier Alfieri Maserati. C’est là que Gordini commence à rêver de compétition automobile : pilote, préparateur… Ou les deux. La Première Guerre Mondiale rattrape Gordini qui est appelé sous les drapeaux en 1917, il est rendu à la vie civile en 1919.

                 S’il retrouve son poste chez Isotta Fraschini, il aspire désormais à profiter de la vie comme tout ancien combattant. Il se marie en 1920, devient père en 1921. C’est à cette époque qu’il fabrique sa première voiture avec un châssis de sa conception sur lequel il monte un moteur Bianchi; voiture qu’il revend très rapidement. En 1921, il quitte Isotta Fraschini pour devenir mécanicien auprès du Comte Moschini pour entretenir ses nombreuses automobiles. Il fabrique sa deuxième voiture sur un châssis Scat qu’il associe à un moteur Hispano Suiza dont il parvient à lui faire développer 180Ch. La voiture est confiée au jeune pilote Tazio Nuvolari, elle permet d’atteindre la vitesse de 230km/h lors d’une course en 1922. 

Un italien à Paris (1921-1936)

           En 1921, Amedeo Gordini décide de partir en France et s’établit à Paris. En Italie, alors pépinière de talents en devenir, Gordini ne parvient pas à imposer sa vision de la chose automobile. En France, il espère que les portes s’ouvriront plus facilement tant pour piloter que pour préparer des voitures de courses. Il va trouver un premier poste au sein du garage Duval et Cattanéo, spécialiste des voitures de luxe et notamment de la marque Hispano-Suiza. Ce poste permet à Gordini d’approfondir ses connaissances en travaillant sur des modèles d’exception. Son travail lui permet de gravir les échelons rapidement pour devenir chef de l’atelier de réparation. 

                 En octobre 1925, il obtient son permis de conduire puis il démissionne de son poste en 1926 pour voler de ses propres ailes. Il s’installe dans les anciennes écuries d’un château de Suresnes dans lesquelles il fonde un garage automobile avec cinq ouvriers, il se spécialise dans l’amélioration des moteurs. Un travail qui lui permet d’obtenir une certaine notoriété. Surtout, il peut désormais vivre son rêve : préparer ses propres voitures et courir. En 1927, il se fait remarquer lors de la Course de ralenti du Mont Valérien : la Fiat préparée par ses soins gagne l’épreuve devant une Duesenberg préparée par Cattanéo. Un exploit réitéré l’année suivante, ce qui vaut à Gordini le sobriquet de magicien du ralenti.  

                  En 1929, Gordini obtient la nationalité française après deux années de procédure de naturalisation, il faut désormais l’appeler Amédée Gordini. Jusqu’au milieu des années 1930, l’atelier de Gordini lui permet d’exercer son talent et d’en vivre, en dépit de la crise économique. En 1934, Amédée Gordini dont la réputation est déjà bien établie se fait remarquer au Bol d’Or. Sur une Fiat de sa conception, il bat les Salmson, MG et autres Amilcar pourtant bien établies et munies de compresseur. Le nom de Gordini apparait dans l’actualité sportive, il obtient des victoires de catégorie au Monte Carlo, à Reims, à Spa, au Grand Prix de Provence. Et surtout, des victoires avec peu de moyens car construisant ses propres voitures, il n’a pas de mécanicien et ne compte que son fils comme aide. 

                 La réputation de Gordini n’est plus à faire, Henri Théodore Pigozzi qui venait de créer  la Société Industrielle de Mécanique et de Carrosserie Automobile (soit, la SIMCA) en 1934 le contacte. Angelo Molinari lui avait commandé une Fiat 508 S qu’il destinait au Bol d’Or 1936, c’est Gordini qui s’attèle à la préparer. Un problème de calendrier ne permet pas à Molinari de prendre part aux éliminatoires qualificatifs, alors c’est Amédée Gordini qui prend le volant. Cette année là, Amédée Gordini remporte le Bol d’Or. Une publicité exceptionnelle pour SIMCA, et voilà Amédée Gordini propulsé préparateur officiel de Simca pour la compétition. 

Simca Gordini (1936-1951)

                  En devenant préparateur officiel de Simca, voilà Gordini à la tête de l’écurie Simca-Gordini. Simca prend assez peu de risques financiers, tous les frais de préparation et d’engagement sportifs sont à la charge de Gordini, qui sera rétribué sous forme de primes en cas de victoire. Gordini développe des voitures de compétition sur la base de Simca de série, il améliore le moteur et les trains roulants, leur donne une carrosserie profilée, et voilà les Simca-Gordini partir à la conquête de nombreuses courses. Les Simca 5 et Simca 8 modifiées par Gordini vont courir au Mans, elles terminent l’épreuve au fond du classement mais en remportant la victoire de classe en 1937, 1938 et 1939, sans oublier l’indice de performance en 1938 et 1939. Il y a également un record du Monde des 48 heures sur l’autodrome de Montlhéry, et le Bol d’Or 1938 comme victoires majeures. La Seconde Guerre Mondiale brise l’élan des Simca-Gordini. Durant l’occupation, il n’est plus question de compétition, ni même de fabriquer des automobiles…

Simca 5 Gordini

Amédée Gordini se penche sur la Simca 5 pour l’engager en compétition, il opère une profonde modification pour en faire une barquette biplace. Côté moteur, c’est un quatre cylindres de 568cm3 avec une nouvelle culasse en aluminium, il propose 23Ch et permet une pointe à 110km/h. Ce modèle, engagé aux 24 heures du Mans à partir de 1937, remporte l’épreuve dans sa catégorie de 1937 à 1939, et un indice de performance en 1938.

Simca 8 Gordini

La carrosserie des Simca-Gordini évolue d’année en année, avec à gauche une Simca 8 Gordini de 1938 et à droite, une Gordini-Simca T8 avec des lignes plus aérodynamiques. 

             A la Libération, Amédée Gordini reprend vite son activité d’avant-guerre, la Simca-Gordini T8 qui avait participé aux 24 Heures du Mans 1939 reprend du service lors de la première course de l’après-guerre : la Coupe Robert Benoîst, organisée le 9 septembre 1945. A la clé, une victoire de Gordini pilote-constructeur. Malgré le manque de moyens et de pièces, Gordini arrive à faire revivre son écurie. Il faut bricoler, bidouiller, reconditionner des moteurs avec des pièces ayant déjà servi… 

                   En 1946, Pigozzi et Simca reviennent vers Gordini pour relancer l’association d’avant-guerre. Gordini ayant désormais accès au bureau d’études de Simca, le voilà en train de concevoir une nouvelle monoplace qui voit le jour en 1946. Elle remporte de nombreux Grand-Prix jusqu’à la fin de la décennie, de nombreux pilotes se joignent à l’aventure (Wimille, Sommer…). C’est à cette époque que Amédée Gordini raccroche le volant pour se concentrer sur la gestion de son écurie, et recrute des anciens de Bugatti.

        Pour autant, l’écurie Gordini ne roule pas sur l’or, elle assume le développement de ses voitures, les salaires de son équipe (ingénieurs, pilotes,…), les frais d’engagements et de transport de ses voitures; et comme seule source de revenu les primes offertes par les organisateurs d’épreuves et celles de Simca. Le manque de ressources n’empêche pas Gordini d’expédier deux voitures en Amérique du Sud. C’est ainsi qu’en Argentine en 1948, on verra le jeune Fangio à bord d’une Gordini. 

        Pour autant, la période est difficile pour Gordini, le recours aux pièces issues de la grande série n’aide pas aux performances, on reconditionne toujours les voitures avec des pièces de seconde main faute d’argent. Surtout, face à une concurrence de plus en plus féroce, Gordini pousse ses voitures dans leurs retranchement pour en obtenir le plus de puissance possible, notamment avec des compresseurs. Mais ce fut au dépend de la fiabilité et de la sécurité des pilotes. En 1949, Jean-Pierre Wimille se tue à bord d’une Gordini lors des essais du Grand Prix de Buenos Aires. L’année suivante, c’est Raymond Sommer qui perd la vie à Cadours. Et malgré tout, les Simca Gordini ne pouvaient pas rivaliser les Talbot, Ferrari, Maserati ou Alfa Romeo…

Gordini isolé : gloire et faillite (1951-1956)

            Pour continuer, Gordini demande à Simca des subsides pour développer un moteur à plus forte cylindrée. Pour Pigozzi, une telle entreprise s’éloigne des activités de Simca et renonce. C’est la fin de la collaboration entre Simca et Gordini, après un palmarès d’une grosse centaine de victoires. Les raisons avancées sont multiples, entre le lancement de la Simca Aronde qui nécessitait des fonds pour Simca et la crainte que les échecs de Gordini nuisent à l’image de la marque, pendant que certains y voient une décision de Fiat, alors propriétaire de Simca, de faire disparaitre Gordini qui aurait pu se révéler être une sérieux concurrents aux voitures italiennes. Quelques temps plus tard, c’est la société Englebert qui ne souhaite plus fournir Gordini en pneumatiques. 

                A l’aube de la saison 1951, c’est un Gordini isolé qui va partir à la conquête de nouvelles victoires. Libéré de Simca, Gordini va se surpasser pour mettre au point un moteur de sa conception qui ne doit rien à la marque de Pigozzi. Ses ingénieurs étudient de nombreuses solutions, parfois abandonnées en cours de développement au profit d’une autre plus prometteuse. Errant entre la Formule 1 et la Formule 2, l’écurie Gordini modifie ses voitures entre deux courses pour répondre aux normes des différentes catégories. Cela épuise les machines et les hommes. A la fin de la saison, les résultats sportifs de Gordini sont désastreux,  l’écurie est proche de la faillite. 

                 Pour s’en sortir, Gordini part à la chasse aux primes de départ offerte par les organisateurs des épreuves à chaque voiture s’élançant. Pour les victoires, Gordini recrute les pilotes Jean Behra et Nano da Silva Ramos. Lors de la première manche du championnat 1952, soit le Grand Prix de Suisse, Gordini y engage deux voitures (l’une est prête in-extrémis et rallie l’épreuve par la route depuis Paris...). Jean Behra monte sur la troisième place de l’épreuve. Plus tard dans la saison, lors du Grand Prix de la Marne sur le circuit de Reims, la Gordini de Behra remporte l’épreuve devant des Ferrari pourtant jugées imbattables. Mais sans dévoiler la suite, il s’agit de la dernière victoire française sur une épreuve internationale avant 1965… 

                      Si Gordini se débrouille en solitaire, les finances de l’écurie restent fragiles, et aucun constructeur français ne vient à la rescousse de la dernière entité représentant la France en sport automobile. Alors le journal l’Action Automobile et Touristique va prendre l’initiative et participer aux frais de déplacement de l’écurie Gordini pour la Carrera Panamericana 1952. Malgré une première étape remportée par Jean Behra, l’écurie Gordini ne peut rien face à l’armada Mercedes-Benz. Quelques mois plus tard, c’est toujours l’Action Automobile et Touristique avec l’Equipe  qui vont mettre sur pied une souscription auprès du grand public pour lever des fonds, avec comme ambition la défense du sport automobile français. 

                 En 1952 toujours, Gordini expose au salon de l’Auto de Paris. Sur le stand, il y a la nouvelle monoplace de l’écurie, mais surtout un roadster sport destiné à de riches clients. La voiture est fabriquée sur le même châssis et équipée du même moteur que la voiture de compétition. Il s’agit de faire émerger un constructeur dont les ventes d’automobiles aideraient Gordini à financer son écurie. Un modèle à la Ferrari donc. Mais Gordini n’avait pas les moyens financiers et humains de produire cette voiture. Fin de la parenthèse. 

                      Les années suivantes voient la descente aux enfers de l’écurie Gordini, avec quelques coups d’éclats passagers. La saison 1953 ressemble à la saison 1952, les succès en moins. On note une sixième place au général des 24 Heures du Mans, mais la prime distribuée par l’ACO ne couvre pas les frais d’engagement de l’équipe… Sur la saison 1954, le duo Pollet Jacques – Gauthier Hubert remporte le Tour Auto sur une Gordini T15S; Jean Behra le Grand Prix de Pau.

                 Mais derrière ces succès se cachent un nombre conséquent d’abandons, une partie de la presse automobile française tire sur Amédée Gordini et sa politique d’engager des voitures coûte que coûte dans de nombreuses épreuves pour prendre la prime de départ, quitte à y envoyer des voitures rafistolées dont on sait sciemment qu’elles ne pourront jamais terminer la course. 

                   La saison 1955 fut courte, interrompue après le drame des 24 Heures du Mans. Les compétitions automobiles sont temporairement interdites dans de nombreux pays, France comprise. Pour Gordini déjà fragile financièrement, ça sent la fin faute de primes de départ, alors la principale source de revenus. Et il ne faut pas compter sur une aide des pouvoirs publics… Cela n’empêche pas Gordini de présenter en juillet une nouvelle monoplace à moteur huit cylindres en ligne de 2,5 litres de cylindrée et 256Ch : la Gordini Type 32. L’écurie participe à la saison 1956, avec une ultime victoire de prestige avec le pilote Robert Manzon sur une Gordini T15S au Grand Prix de Pescara. Mais à la fin de la saison, les caisses de Gordini sont vides, et l’écurie baisse définitivement le rideau. 

Gordini, par Renault (1957-1975)

             Avant même la fermeture de l’écurie Gordini, la Régie Renault et Amédée Gordini ont leurs premiers contacts, le constructeur de Billancourt souhaite commercialiser une version sportive de sa nouvelle Dauphine. A l’issue de la saison 1956 et la fermeture de son écurie, Amédée Gordini n’a d’autres choix que d’accepter la proposition de Renault. Le contrat est signé en janvier 1957, Amédée se concentre sur la préparation des moteurs et prête son nom à la commercialisation d’une Dauphine sportive. Un changement total d’activité pour celui qui maintenait des voitures pour courir le week-end.

                  Gordini mettait au point la dauphine Gordini, présentée lors du salon de Paris 1957. A l’origine, Renault livrait à Gordini des Dauphine de série qu’il modifiait pour les restituer à Renault qui les écoulait dans son réseau. Mais rapidement, face à l’afflux de commandes, Renault reprend la production des Dauphine Gordini dans ses usines, octroyant à Amédée Gordini des royalties sur chaque modèle produit. Cela permet à Amédée Gordini de maintenir ses installations et de travailler sous le contrôle des bureaux d’études de la Régie Renault sur divers projets soit de son propre chef, soit à la demande de Renault. 

Renault Dauphine Gordini

En 1957, Renault fait appel à Amédée Gordini pour réaliser une version performante de sa berline Dauphine. Gordini modifie le moteur et la boîte de vitesses pour faire naître la Dauphine Gordini type R1091.

                 Le point d’orgue de la collaboration entre Gordini et Renault fut sans conteste la Renault 8 Gordini, présentée en 1964. Une fiche technique avec des performances de premier ordre, un prix contenu, une robe « bleu France » rehaussée de deux bandes blanches, voilà comment faire naître un mythe. La version 1300 lancée en 1966 lui donne le surplus de puissance qu’il manquait au modèle original, et voilà une voiture capable de courir en rallyes, puis de faire naitre une coupe monotype qui constitua une école de pilotage pour de nombreux jeunes pilotes. 

Renault 8 Gordini

Renault 8 Gordini, voilà un nom resté dans l’histoire de l’automobile française. La « Gorde » est l’icône sportive française des Trente Glorieuses, une école de pilotage qui a formé toute une génération de pilotes. Pas chère, sportive et promue par une formule monotype, la R8 Gordini.

              Un autre projet d’envergure pour Amédée Gordini était l’étude d’un V8 pour courir en compétition à la fin des années 1960, un moteur que le constructeur Alpine aurait bien repris pour courir en Formule 1. Hélas, le moteur ne développe pas la puissance nécessaire pour la catégorie reine et Renault pose rapidement son véto sur une telle aventure. Quant à l’endurance, le V8 monté dans l’A220 ne permet pas à Alpine d’aller jouer la gagne. 

Le V8 Gordini

A partir de l’été 1966, Alpine pense pouvoir aller jouer la gagne en endurance et Gordini se met à plancher sur un V8 de trois litres de cylindrée. Fabriqué au printemps 1967, il est essayé à partir de juillet. Ce V8 doit marquer l’aboutissement de la collaboration entre Renault et Gordini, d’autant que la F1 était alors en ligne de mire…

           En 1969, les ateliers de Gordini situés aux portes de Paris déménagent pour Viry-Chatillon, dans une usine flambant neuve financée par Renault. Un changement imposé par Renault pour que Gordini bénéficie d’installations modernes plus adaptées à l’époque et aux attentes du constructeur au losange. Mais Amédée Gordini ne se fait pas à ce changement, difficile pour lui de se sentir chez lui d’autant que l’équipe de techniciens s’était renouvelée. Petit à petit, Amédée Gordini se retire des projets en cours. Pour les services qu’il a rendu à la Régie, on lui octroi en 1972 le poste de président d’honneur de la SA Renault Gordini. Il resta un représentant de la Régie Renault jusqu’en 1976, avant de se retirer pour une retraite de quelques années. 

Héritage : du marketing

           La fin des années 1960 marque le retrait d’Amédée Gordini du travail de recherche de l’entité SA Renault Gordini. Gordini va petit à petit devenir une griffe commerciale, cela commence à l’été 1970 avec la Renault 12 Gordini. Le succès rencontré par la R8 Gordini ne laissait pas le choix à la Régie de lui donner une descendance. Et sur la Renault 12 Gordini, Amédée Gordini n’est pas intervenu. La nouvelle venue, plus berline sportive que bête de circuit, va décevoir moult Gordinistes, ne serait-ce par le passage du tout à l’arrière au tout à l’ avant. Produite jusqu’en 1974, il s’en écoula moitié moins que de R8 Gordini. Dans le même temps, Simca proposait une Rallye qui avait tout pour plaire aux propriétaires de R8 Gordini… 

            En septembre 1974, après l’arrêt de la R12 Gordini, c’est la R17 qui bénéficie de l’appellation Gordini. En fait, un R17 TS simplement rebadgée. La clientèle n’est pas dupe et, lors du restylage du modèle en 1976, la R17 TS est réintroduite avec une puissance de 98Ch quand la Gordini en proposait 108. Le service compétition de Renault engagea des R17 Gordini en Rallye avec plus ou moins de succès, on l’emporte même aux Etats-Unis pour faire connaitre la marque Renault et Gordini, avec à la clé un succès sportif qui ne se traduit pas en réussite commerciale. De toute façon, la R17 Gordini a du mal à convaincre et le modèle fut rapidement oublié des deux côtés de l’Atlantique. 

                En 1976, l’entité Renault Gordini est intégré au sein de la structure Renault Sport qui prend ses quartiers à Viry-Chatillon. Le début d’une nouvelle ère à base de Turbo qui effacera vite le blason Gordini des modèles sportifs du losange. Pour la version sportive de la Renault 5 lancée cette-là, on lui préféra le blason Alpine, constructeur racheté en 1972 par Renault, sauf au Royaume-Uni où elle prend l’appellation Gordini (le nom Alpine étant outre-Manche la propriété de Sunbeam). Entre Alpine et son A310 désormais équipée du V6 PRV, et le Turbo, Gordini appartient rapidement au passé. 

                Quant à Amédée Gordini, il continua à venir sur le bord des circuits jusqu’en 1978, avant d’être rattrapé par la maladie qui le contrait dans ses déplacements. Il décède le 25 mai 1979 et fut inhumé au cimetière de Montmartre.

         L’appellation Gordini n’est quant à elle jamais tombée dans l’oubli, Renault la ressort en 2010 initialement sur les Clio et Twingo RS. En fait, une simple opération de marketing puisque à l’exception de sa teinte bleue (même pas un Bleu de France…) et ses bandes blanches, rien ne distingue une RS classique d’une RS Gordini. Pour autant, la finition Gordini fonctionne et, face à l’engouement du public, Renault la décline sur les modèles GT, disponible avec un moteur Diesel sur la Clio. Enfin, pour tenter de sauver les ventes du roadster Wind, ce modèle reçoit aussi la finition Gordini à partir de 2011. L’opération dura quelques années sans être renouvelée.