Bédélia : l’histoire de la marque

              Pionnier français du cyclecar, Bédélia est un constructeur automobile atypique parmi nos constructeurs nationaux. Fondé par deux amis en 1910, la Bédélia est une automobile hybride, pas tout à fait une voiture, pas tout à fait un motocyclette, mais entre les deux. Une position atypique qui se fait remarquer  tant en compétition que par la clientèle… 

Bedelia (z)

           A l’origine de la marque Bédélia, on retrouve deux jeunes amis, Robert Bourbeau et Henri Devaux, tout deux étudiants dans l’école d’ingénieurs généralistes de la rue Violet à Paris. Sur leur temps libre, les deux compères, propriétaires d’une motocyclette de marque J.Quentin, équipée d’un sidecar, prennent le large jusqu’au jour où un incident détruise leur précieux moyen de locomotion, dont il ne reste plus que le moteur. Sans le sou pour acheter un autre véhicule, Bourbeau et Devaux décident de mettre en oeuvre leur talent d’ingénieur pour créer un véhicule autour du moteur qu’il leur reste.

Bedelia (1)

            Avec peu de moyen, ils réalisent un engin étonnant, pouvant transporter deux passager en tandem avec le pilote placé à l’arrière. Ce véhicule est donc long mais très étroit, le moteur J.Quentin se trouve à l’avant au dessus duquel est placé le bidon d’essence permettant une alimentation par gravitation, s’épargnant ainsi de créer une pompe ou des syphons. La voiture est très spartiate : le châssis est composé de deux longerons en frêne, la carrosserie est réalisée en simple contreplaqué, les fauteuils sont de simples sacs en toile tendus sur une armature.

bedelia 1

            Sur le plan technique, la suspension est assurée à l’avant par un essieu rigide suspendu en son centre par un amortisseur central (qui sert également de pivot de direction), à l’arrière, deux ressorts à lames sont installés. La transmission de la voiturette est également originale : si le moteur est à l’avant, la transmission d’effectue aux roues arrière par le biais d’une chaîne qui entraine un arbre primaire, lequel entraine des poulies solidaires aux roues. Ces poulies, de diamètre différent, permettent de « changer de vitesse » à l’aide d’un levier. En revanche, la marche arrière est aux abonnés absents, et le freinage est constitué de deux patins sur chaque roue arrière.

                Bourbeau et Devaux réussissent leur pari en faisant rouler leur voiturette, qui avec son poids plume de 150kg et les 3,5 Ch de son moteur, permet des performances remarquables pour l’époque : le 70km/h est à portée. Si cette voiture n’a alors aucune ambition commerciale, elle attire toutefois des personnes sur son chemin qui se disent intéressées d’acquérir une telle voiture. Et pour cause, à l’époque, parmi les voitures les moins chères, on pouvait citer la Le Zèbre à moteur De Dion, qui s’offrait tout de même moyennant 2.680 Francs, ou la plus petite des Delage à 3.600 Francs. Bref, la Bedelia a une carte à jouer, et ses créateurs s’en rendent rapidement compte.

bedelia (a)

          Toutefois, une première question épineuse doit être résolue : comment industrialiser une voiture réalisée de bric et de broc ? En 1909, la société Bédélia est fondée pour commercialiser cette petite voiture, le père d’Henri Devaux finance l’affaire permettant l’acquisition des matières premières. Un hangar situé à Paris au 32 rue Félicien David fait l’affaire pour accueillir l’atelier. L’aventure commerciale débute courant 1910, et sans surprise, la Bédélia est le véhicule à quatre roues le moins cher du marché avec ses 1.200 Francs.

           Pour la petite histoire, la voiture est si peu onéreuse que l’armée française s’y intéressa en visant deux applications possibles, une première en équipant la Bédélia d’une mitrailleuse à l’avant, la seconde pour faire un brancard roulant pour évacuer les blessés le plus rapidement des champs de bataille. L’armée ne donna pas suite mais même sans ce marché militaire, Bédélia se contente des voitures de tourisme pour faire prospérer la société. En 1911, c’est même une gamme qui est proposée avec la Type A1, une version plus puissante de la Bédélia originelle avec un moteur J.Quentin de 4,5 Ch, et la Type BD1 et son moteur réalisé par Robert Bourbeau proposant 5,5 Ch.

Bedelia 1911 (1)

           C’est à partir de cette époque que Robert Bourbeau se pique à la compétition et conçoit une Bédélia équipée d’un bicylindre en V placé longitudinalement dans la carrosserie, le constructeur se constitue un palmarès qui va aider au développement national de Bédélia. Comme succès, le premier fut une victoire de catégorie au Meeting Automobile du Mans en juin 1911,  il fut suivi par de nombreuses victoires en course de côte, un succès au Tour de France automobile 1912 en catégorie Cyclecar, ainsi que des records de vitesse dans sa catégorie.

             Le succès de Bédélia ne se dément pas d’année en année, l’apparition d’une version « livraison » sur laquelle la place avant est remplacée par un coffre permet d’élargir la clientèle cible. Vendue comme une voiture minimaliste, la Bédélia souffre de quelques défauts effacés tant par son prix que par l’efficacité de la voiture, si bien que les développements furent rare. Seule l’esthétique de la voiture amélioré par l’adoption d’un pare-brise, ailes « garde-boue », roue de secours, double phares et capote en option.

Bedelia course 1913

              En 1913, la gamme est refondue avec la Type AC en entrée de gamme, mue par un monocylindre de 6/8 HP, la Type BD1 comme véhicule de livraison, et la Type BD2 MG pour chapeauter la gamme, équipée d’un bicylindre en V de 1100cm3 pour 8Ch qui s’offre moyennant 2.650 Francs. Outre une pointe à 80km/h, la voiture offre une meilleure présentation, un carburateur et une magnéto.

Bedelia Type M

              Avant que ne surgisse la première Guerre Mondiale, la production de Bédélia est estimée à 3.000 exemplaires depuis ses débuts, principalement écoulé en France bien qu’une partie de la production trouve preneur au Royaume Uni (où la voiture est équipée d’un moteur JAP) ainsi qu’en Italie. Le conflit mondial entraine l’arrêt de la production, quand l’armistice est signée, les deux associés décident de se séparer. Leur affaire revendue aux Etablissements L.Maheux & Cie, Bédélia se fit discrète jusqu’en 1920, si bien que plusieurs journaux pensent la marque éteinte. Robert Bourbeau tente une aventure de son côté et fonde la marque Jacquemont.

bedelia 1924

            Quant à Bédélia, la marque renaît en 1920 par la présentation d’une nouvelle génération de cyclecars, dénommé « Série M » mais son repreneur n’a pas l’inventivité de Bourbeau et Devaux. Voiture banale, sans originalité, les nouvelles Bédélia ne rencontrent par leur public mais jouissent toutefois de la fiscalité avantageuse offerte aux cyclecars. Mais la concurrence se fait plus redoutable avec des modèles plus aboutis, poussant Bédélia a proposer des améliorations sur sa gamme 1923, sans succès. Pire, à vouloir offrir un équipement toujours plus complet, le prix des Bédélia se rapproche dangereusement des véritables voitures d’entrée de gamme (Citroën Type A, Renault Type NN…). C’est finalement le changement de fiscalité applicable aux cyclecars, courant 1924, qui fut fatale à la marque, qui disparaît courant 1925.

8 réflexions sur « Bédélia : l’histoire de la marque »

  1. Bonjour mon beau père a dans c est photo la photo de la Bedelia avec le Monsieur et la Dame et on aimerais bien savoir si des personnes parmi vous serait comment elles appelées. Merci beaucoup pour vos réponses

  2. Rebonsoir,

    Je vais vous donner quelques information sur : « Pour la petite histoire, la voiture est si peu onéreuse que l’armée française s’y intéressa en visant deux applications possibles, une première en équipant la Bédélia d’une mitrailleuse à l’avant, la seconde pour faire un brancard roulant pour évacuer les blessés le plus rapidement des champs de bataille ».

    Ce n’est pas l’armée française qui s’intéressa aux voiturettes mais le docteur Charles, Auguste, Paul Michel et c’est lui qui (ou fit) adapta un brancard sur sa Bédélia. Ainsi gréé, le médecin aide major de l’armée d’active Paul Michel et fournisseur du Ministère de la Guerre (service de Santé) participa avec succès aux manœuvres de santé 1910 du gouvernement de Paris. Avec sa Bédélia il passa sur des rondins, des sentiers et même en terrains variés (sic)…

    Amusant n’est-il pas !

    Bien à vous

  3. Bonjour, Dans cette histoire de Bédélia je note des incohérences. 1 – Les Ets J. Quentin ne proposaient pas de motocyclette et moteur « Quentin Levallois » avec bicyclindre en Vé mais uniquement des monocylindres. 2 – Ils ne proposaient pas non plus de sidecar, il était toujours possible d’acheter un attelage d’une autre maison mais des détails sur les premières Bédélia dont je possède les documents me font chercher une autre piste. 3 – Bédélia n’est pas une société mais la marque d’une société. 4 – Impossible que Bédélia ait été créée en 1909. 5 – La 1ère Bédélia est une 3HP et pas 3,5cv…. Cela fait beaucoup d’erreurs et approximation dans ce texte ! Pas une date de fiable et pas un document factuel sur les début, c’est pas sérieux ! Cela vous intéresse des documents factuels du début Bédélia ?

    1. Cher Monsieur,

      Je fais suite votre commentaire sur l’article concernant la marque Bédélia afin d’améliorer son contenu et vous répond à vos remarques :

      « 1 – Les Ets J. Quentin ne proposaient pas de motocyclette et moteur « Quentin Levallois » avec bicyclindre en Vé mais uniquement des monocylindres.  »

      Sauf erreur de ma part, le seul moteur en V mentionné dans l’article concerne une voiture de la conception de M. Robert BOURBEAU pour courir en compétition et non un Moteur J. Quentin. Le moteur en V fut par la suite repris dans la gamme Bédélia, comme justifié par un article de la revue « Automobilia » de 1919 dont une copie a été publiée par mon Confrère du blog « patrimoine automobile » sur ce lien : https://i1.wp.com/patrimoineautomobile.com/wp-content/uploads/2017/05/Automobilia-1919.jpeg

      « 2 – Ils ne proposaient pas non plus de sidecar, il était toujours possible d’acheter un attelage d’une autre maison mais des détails sur les premières Bédélia dont je possède les documents me font chercher une autre piste.  »

      La phrase de l’article est : « propriétaires d’une motocyclette de marque J.Quentin, équipée d’un sidecar… » . Une motocyclette d’une marque X, équipée d’un side-car de la maison D, reste une motocyclette de la marque X équipée d’un sidecar.

      « 3 – Bédélia n’est pas une société mais la marque d’une société.  »

      Vous avez raison sur ce point.

      « 4 – Impossible que Bédélia ait été créée en 1909. »

      Quelle année proposeriez-vous pour la constitution de cette marque ? C’est entre 1907 et 1910 au vu des documents que j’ai pu lire sur le sujet.

      « 5 – La 1ère Bédélia est une 3HP et pas 3,5cv….  »

      En 1911, la Type A disposait d’un moteur J.Quentin de 3 Ch 1/2 comme vous le cosntaterez sur le document en pièce-jointe. Mais c’est vrai que nous ne sommes pas sur la première Bédélia.

      « Cela vous intéresse des documents factuels du début Bédélia ? »

      Bien évidement que de la documentation sur ce constructeur m’intéresse !

      Dans l’attente de vous lire,

      Bien cordialement,

      Alex Renault

      1. Cher Monsieur,

        Merci de vos réponses et voici les miennes :

        1 – En fait votre texte est ambiqus car dans votre histoire de Bédélia il n’est nullement mentionné l’architecture des moteurs Quentin et Bourdeau mais l’auteur a écrits  » En 1911, c’est même une gamme qui est proposée avec la Type A1, une version plus puissante de la Bédélia originelle avec un moteur J.Quentin de 4,5 Ch, et la Type BD1 et son moteur réalisé par Robert Bourbeau proposant 5,5 Ch. C’est à partir de cette époque que Robert Bourbeau se pique à la compétition et conçoit une Bédélia équipée d’un bicylindre en V placé longitudinalement dans la carrosserie ». Si l’on connait les travaux de Bordeaux sur son monocyclindre 2 temps on est appelé à en déduire que le bicyclindre en question ne peut-être qu’un un Quentin or, J. Quentin ne proposa aucun bicyclindre, ni industriel, ni dans une moto…. et je ne suis pas le seul à relever cette ambiguïté. Voir aussi ici

        http://zhumoriste.over-blog.com/article-le-cyclecar-cousin-de-la-moto-ou-de-l-auto-2-123918191.html

        2 – Nous disons exactement la même chose, sauf qu’ayant trouver par hasard les images des 2 premiers Bédélia, hormis le moteur, on ne transpose rien ou presque d’une moto et de son side pour crééer une voiturette. Donc m’appuyant sur les documents, la maison J. Quentin proposait non pas un sidecar mais un Tricar, un trois roues dont l’essieu avant était directeur et dont la transmission finale à la roue arrière se faisait via une courroie et une poulie-jante sauf pour le modèle de course qui avait une transmission à chaîne mais dont on avait laissé la poulie-jante pour le frein. Or des éléments de ce Tricar se retrouvent dans les Bédélia, le fameux réservoir caractéristique en forme d’obus et non pas « un bidon », la position de ce réservoir au-dessus du moteur, la transmission arrière par courroie via la poulie -jante mais surtout, le train avant triangulé et directionnel qui n’est pas sans rappeler celui du Tricard ultra-léger Quentin et qui les a inspiré. Voilà pourquoi je voulais attiré votre attention sur mon « autre piste » mais pas un sidecar.

        3 – J’ai le dépôt de la marque. Or une marque, des brevets… sont des biens immatériels d’une entreprise, on peut la déposée avant, après ou pendant la création d’une société….. et son estimés en valeur pour entrer dans le capital de ladite société. Dans leur cas, ils ont créé la société puis on déposait la marque, reste à savoir si les brevets Bourbeau y sont.

        Pour 4 et 5, on est d’accord.

        M’ayant été fait avoir à plusieurs reprises par des spécialiste malandrins de tous bords qui ont utiliser mes travaux de recherches et de numérisations sans me remercier, mentionner ou mentionner la provenance des documents, vous comprendrez que je suis devenu très méfiant aussi je ne passe rien sans m’assurer que les documents et leurs sources que je produits seront nommément mentionnées.
        Si vous êtes d’accord sur ce principe alors je pourrais vous fournir les documents sur lesquels je m’appuis.

        Dans l’attente de votre confirmation, bien cordialement.

        Didier Mahistre

        1. Tiens je vais vous en apprendre une autre :
          Ce n’est pas l’armée française qui s’intéressa aux voiturettes mais le docteur Charles, Auguste, Paul Michel et c’est lui qui (ou fit) adapta un brancard sur sa Bédélia. Ainsi gréé, le médecin aide major de l’armée d’active Paul Michel et fournisseur du Ministère de la Guerre (service de Santé) participa avec succès aux manœuvres de santé 1910 du gouvernement de Paris. Avec sa Bédélia il passa sur des rondins, des sentiers et même en terrains variés (sic)…

          Dommage que l’on ne puisse insérer d’image aux commentaires

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